Wild (en) Bretagne : "acheter des terrains boisés pour les rendre à la nature"

Acheter des terrains boisés pour les rendre à la nature : c'est l'ambition de l'association Wild Bretagne, qui s'apprête à acquérir sa première forêt, du côté de Plouëc-du-Trieux, dans les Côtes d'Armor, grâce à un financement participatif. L'objectif est de laisser la forêt se développer librement, par elle-même, sans intervention humaine, sans couper d'arbre, sans chasse, pour en faire une réserve de vie sauvage.

La zone remplit tous les critères

A Plouëc-du-Trieux, c'est une petite zone forestière d'1,8 hectare que l'association souhaite protéger : des terrains à vendre dénichés sur le Boncoin, et parfaitement adaptés au projet, comme le souligne Alexandre, membre de l'association Wild Bretagne : "c'est une forêt située entre trois milieux différents, un champ, une forêt et une rivière. Quand on a une frontière entre plusieurs milieux, il y a plus de biodiversité et c'est hyper intéressant. C'est une ancienne zone agricole, et il y a une centaine d'années, c'était un champ et comme pour la plupart des terrains en Europe, un champ va se transformer naturellement en forêt... Ici, il n'y a que des espèces locales et spontanées. Ce n'est pas une plantation, ce n'est que de la régénération naturelle et c'est déjà une jeune forêt sauvage. L'idée est de l'acquérir pour éviter qu'elle soit coupée et lui donner lachance d'atteindre un âge plus grand. La zone remplit tous les critères qu'on cherchait."

L'être humain pourra aller voir cette forêt

A quoi correspond exactement une forêt en libre évolution, s'agira-t-il d'une zone interdite ? Quand on dit "aucune intervention humaine cela veut dire aucune coupe d'arbres, aucune chasse, et puis le bois mort sera laissé sur place alors que le bois mort dans une forêt est hyper important. Cela représente un tiers de la biodiversité parce que cela sert de nourriture pour des insectes et des petits animaux. Cela sert aussi d'abri... On va mettre des panneaux le long du Gers, parce qu'il y a déjà un petit chemin qui passe juste à côté : l'être humain pourra aller voir cette forêt, mais pour pouvoir observer quelque chose d'intéressant... Il faut arrêter d'arriver avec ses gros sabots en faisant du bruit, ou en bétonnant un espace."

La forêt de Bialowieza subit le dérèglement climatique

Laisser faire la nature, d'accord, mais alors que le réchauffement climatique s'accélère, la forêt n'a-t-elle pas besoin d'un coup de main pour mieux résister, en plantant des essences d'arbres plus adaptées ? Pas forcément, pour Alexandre, interrogé par Yann Launay et qui s'appuie sur l'exemple de la célèbre forêt sauvage de Bialowieza, en Pologne, où il a eu l'occasion de se rendre : "il y a des arbres qui deviennent plus faibles et qui sont naturellement attaqués par les scolytes. C'est un petit scarabée qui va venir les faire tomber et qui laisser de la place potentiellement à la nouvelle forêt qui peut arriver. C'est un réflexe normal de la nature ! Elle fait disparaître ce qui est plus adapté pour laisser de la place aux nouvelles espèces adaptées... 

 Alors que si on devance la nature, et que l'on coupe toutes les espèces, sans laisser de chance aux arbres de s'adapter, on se prive de la chance d'avoir la nature qui fait son travail de sélection. La nature, c'est un grand labo à ciel ouvert et il faut laisser le temps à cette nature d'expérimenter par elle même la meilleure des solutions !"

On a quasiment plus de zones sauvages en France !

Il existe déjà des parcs naturels, partout en France, et puis l'Office National des Forêts met en place des réserves biologiques intégrales, des espaces forestiers en évolution libre, dans l'esprit de ce que souhaite faire Wild Bretagne.

Alors pourquoi ne pas s'en remettre aux organismes publics ?

"Les réserves intégrales en moyenne mettent en général plus de 15 ans à se monter mais là la destruction du vivant, des habitats et des écosystèmes, c'est maintenant et à chaque fois on n'a pas 15 ans à attendre, on a envie d'agir vite ! En France, 0,14 % de nos forêts sont laissées en libre révolution donc sans aucune intervention humaine, alors que l'objectif européen est de plus de 10 %. On a quasiment plus de zones sauvages en France... C'est pour ça qu'on a envie d'acheter des terrains pour les laisser en libre évolution parce que quand potentiellement les institutions ne peuvent pas ou ne font pas l'effort de protéger ces zones là, on se dit qu'il n'y a plus que les citoyens, qui ont envie de faire une petite action."

Le financement participatif a été lancé sur la plateforme HelloAsso, afin de collecter la somme nécessaire à l'achat des terrains (près de 7000 euros). La campagne s'achève dans 5 jours, vous pouvez encore contribuer, en entrant Wild Bretagne dans la barre de recherche du site HelloAsso.