Garage solidaire à Saint-Nazaire : des véhicules "loués à des publics en difficulté"

Publié : 17 avril 2024 à 16h15 par Dolorès CHARLES

Garage solidaire à Saint-Nazaire (44)
Garage solidaire à Saint-Nazaire (44)
Crédit : Yann Launay

C'est une initiative solidaire que nous mettons en avant aujourd'hui : à Saint-Nazaire (44), un garage récupère des voitures "prime à la conversion" chez les concessionnaires avant de les remettre en état et de les louer à des publics en difficulté, pour qui la voiture est indispensable.

Des milliers de voitures en état de marche sont envoyées à la casse, dans le cadre de la prime à la conversion, mais désormais ces voitures vont pouvoir être réemployées, et confiés à des publics précaires. La loi qui l'autorise vient d'être adoptée. C'est à Saint-Nazaire en Loire-Atlantique, que l'idée a germé, au garage solidaire "Re-pare". Jacques Malthieu, le fondateur du garage, avait soufflé l'idée à plusieurs députés dont le Morbihannais Joël Labbé, qui ont porté le projet de loi.

La voiture, un atout pour aller travailler

Ce n'était pas gagné d'avance : cette prolongation de vie pour des voitures thermiques pouvait sembler entrer en contradiction avec l'objectif de la prime à la conversion, mais Jacques Malthieu est satisfait de constater que le bon sens l'a emporté. "Les mentalités ont évolué et ce qui était impensable en 2019 - 2020, est aujourd'hui complètement admis. D'ailleurs, le gouvernement encourage plutôt au réemploi, à réparer plutôt que de jeter. Il s'agissait de voitures en bon état qu'on allait jeter, or on a des clients qui n'ont pas les moyens de faire réparer leur voiture, et qui peuvent potentiellement perdre un travail parce qu'ils ne peuvent plus l'utiliser, ou qui ne peuvent pas répondre à une offre parce que leur voiture n'est pas en état de rouler et d'aller au travail tous les jours."

Jacques Malthieu, le fondateur du garage
Crédit : Yann Launay

Comment le système va-t-il fonctionner ?

Les décrets d'application sont attendus, et le garage solidaire de Saint-Nazaire sera donc l'un des premiers à s'emparer de la loi. Il pourra donc sélectionner des voitures "prime à la conversion" chez les concessionnaires avant de les remettre en état et de les louer.

Pour Jacques Malthieu, ancien prof de mécanique, l'idée est "de pouvoir en effet choisir les voitures chez les concessionnaires... et une fois choisies, les voitures sont mises à la disposition du garage pendant deux ans, sous-forme d'une location longue durée. Le garage remet alors en état ces voitures, fait les révisions et échange les pièces nécessaires s'il y a besoin, passe le contrôle technique et la voiture peut enfin être louée en location longue durée - ce sera entre 50 et 100 € par mois, entretien inclus. L'utilisateur a deux ans et à l'issue des deux ans, soit il repart avec un nouveau un contrat longue durée de deux ans ou s'il s'est refait une santé financièrement, il pourra acheter une voiture à lui."

... et quel est le public visé ?

Les véhicules pourront être loués à des publics en difficulté, "forcément des adhérents du garage qui n'ont pas de solution pour conserver leur travail parce que leur voiture nécessite des travaux trop importants, et trop onéreux... Cela peut être aussi une mère célibataire, qui a des enfants à gérer avec une voiture en très mauvais état. Dans nos clients, 74 % sont des femmes, et des familles monoparentales en grande difficulté, pour qui la voiture est indispensable."

Jacques Malthieu
Jacques Malthieu
Crédit : Yann Launay
Jacques Malthieu, le fondateur du garage
Crédit : Yann Launay

"On m'a dit qu'on ne me laisserait pas tomber... et aujourd'hui je revis et mon entreprise aussi !"

Tania est productrice de plantes aromatiques et médicinales, à Saint-Nazaire. Son utilitaire a rendu l'âme, et elle s'est tournée vers le garage solidaire. Tania était dans l'impossibilité de racheter une voiture d'occasion... et dans l'impossibilité de s'en passer "pour aller chercher mon terreau, pour les cueillettes que je peux faire sur des lieux extérieurs, et tout simplement pour aller de mon domicile jusqu'à la parcelle, le véhicule reste indispensable. Sauf que le marché a pas mal évolué en deux ou trois ans par rapport à ce que j'avais acheté... Je suis donc agricultrice, au RSA agricole, ce qui fait que j'ai pu solliciter le garage solidaire. Dans un premier temps, le garage m'a prêté un véhicule dans l'attente de recevoir un véhicule à me vendre, et j'ai attendu quelque temps avant de bénéficier d'un Kangoo. On m'a dit qu'on ne me laisserait pas tomber, c'est chouette ! Je revis et mon entreprise aussi."

Tania
Crédit : Yann Launay

Le garage solidaire de Saint-Nazaire compte plus de 1 400 adhérents. Dans ce garage associatif, le tarif des réparations est fonction des revenus des adhérents. La loi a été promulguée le 5 avril, et les décrets d'application sont attendus dans les mois qui viennent. Le loyer mensuel pour une voiture de réemploi social devrait rester inférieur à 100 euros.