Retraites. Marée humaine contre la réforme dans l'ouest

Publié : 7 mars 2023 à 22h11 - Modifié : 7 mars 2023 à 22h41 par Dolorès CHARLES

Manifestation à Ploërmel (56)
Crédit : Yann Launay

Les cortèges étaient très fournis en ce mardi 7 mars pour la 6ème journée de mobilisation, contre la réforme des retraites, dans les grandes comme les petites villes. Nous étions à Ploërmel dans le Morbihan, où 2 000 personnes ont défilé. Réactions au cœur du cortège breton.

Les manifestants contre la réforme des retraites, actuellement débattue au Sénat, étaient très nombreux ce mardi encore, bien plus que lors des précédentes journées : 150 000 personnes ont manifesté en Bretagne, dont 14 000 à Vannes, 18 000 à Lorient, ou environ 20 000 à Brest. A Rennes, ils étaient entre 19 000 à 40 000 selon les sources, avec en fin de cortège des affrontements et des gaz lacrymogènes lancés place de Bretagne et place Sainte-Anne. Onze personnes ont été interpellées. A Nantes, la préfecture annonce 30 000 personnes contre 75 000 pour les syndicats et il y a eu huit gardes à vue, en marge du défilé. 19 000 autres personnes ont défilé à Angers, 15 000 à Saint-Nazaire et 10 000 autres à Laval.

Une mobilisation aussi dans les petites villes

Un millier de manifestants a été recensé à Clisson, petite cité italienne de Loire-Atlantique et 2 000 à Ploërmel dans le Morbihan, un chiffre en hausse. Certains comme Nadia s'attendaient à une mobilisation plus grande encore. Agée de 40 ans, Nadia est employée dans une usine de transformation de viande, et elle est venue manifester avec quelques collègues : 

"J'ai été au boulot ce matin : lever à 3 h, (j'ai) commencé à 4 h et je suis partie à 7 heures, mais il n'y a pas beaucoup de collègues qui ont suivi malheureusement. Là, on manifeste, mais je trouve que c'est trop calme. Il faut carrément bloquer pour pousser jusqu'à temps qu'ils réagissent. Je le mets au défi de venir avec nous travailler Monsieur Macron, qu'il "mette son cul" à l'usine et qu'il essaye de voir ce que c'est de travailler à la chaîne. On travaille tous les deux, on a deux enfants et à la fin du mois c'est ric-rac, mais on va au boulot tous les deux. Quand on voit les salaire de misère et là, ils nous poussent jusqu'à 64 ans : on va se tuer au boulot, on repartira avec les os cassés, le dos broyé... Je suis dégouté."

Nadia
Crédit : Yann Launay

Cela nous concerne tous !

Les jeunes sont restés assez rares, dans le cortège morbihannais, même si l'on pouvait croiser quelques lycéens et étudiants comme Pierre, en droit à Rennes 1, qui défile par esprit de solidarité et de cohésion : "qu'on soit jeune ou au bord de la retraite, ça nous concerne tous. On doit pouvoir compter les uns sur les autres, avoir un système de retraites qui est bien financé et qui nous permet de terminer notre période de travail dignement. On a des moyens autres que d'augmenter l'âge de la retraite pour continuer à financer nos système de retraite. Cela va mettre encore plus en difficulté ceux qui triment tous les jours alors que ceux qui profitent du système vont rester dans leur carré d'or ! Les deux tiers des Français sont opposés à la réforme des retraites et il faut le montrer par tous les moyens !"

Mobilisation à Ploërmel (56)
Crédit : Yann Launay
Pierre
Crédit : Yann Launay

On ne peut pas diriger un pays comme une mutinationale

Dans les cortèges, certains manifestaient aussi pour la première fois, quand d'autres en étaient à leur deuxième ou troisième journée "de marche". D'autres encore n'ont pas manqué une journée d'action, comme Sylvain, rencontré par notre reporter Yann Launay, et qui espère que le gouvernement, cette fois, tiendra compte de la mobilisation : "quand on a tort, il faut savoir accepter et s'excuser et qu'on ne laisse pas les choses dégénérer. C'est de l'irresponsabilité. On ne peut pas diriger un pays comme une multinationale. On dirige un pays avec des gens qu'il faut encourager... (ambiance)"

Sylvain
Crédit : Yann Launay

"Le gouvernement reste sourd quoiqu'il arrive"

Quelques tracteurs ouvraient la marche, aux couleurs de la Confédération paysanne. Les agriculteurs dans leur ensemble se font discrets, depuis le début du mouvement, satisfaits d'avoir obtenu le calcul de leur retraite sur leurs 25 meilleures années. Mais pour Thibaut, agriculteur à Monteneuf, pas question de se résigner à travailler plus longtemps. Le trentenaire se dit prêt à se mobiliser jusqu'au retrait de la réforme :

"A chaque fois qu'on descend de plus en plus nombreux dans la rue, il ne se passe rien... Si le gouvernement ne fait aucun effort pour nous, il n'y a aucune raison que le mouvement s'arrête. Ce sont juste des gens qui vivent complètement décorrélés de notre réalité. Moi, je veux bien prendre le rôle d'un député et qu'eux viennent prendre ma place, à se lever tous les jours très tôt, à faire des journées qui ne se terminent jamais et (j'aimerais) voir s'ils arrivent à s'en sortir avec le peu d'argent qu'on se fait en fin de mois."

Thibaut
Crédit : Yann Launay

La grève va se poursuivre ce mercredi à la SCNF et à la raffinerie de Donges (44), et d’autres manifestations sont prévues dans le cadre de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes. L’intersyndicale veut "dénoncer l’injustice sociale majeure de cette réforme des retraites envers les femmes".

Une prochaine journée de mobilisation est d'ores et déjà fixée à ce samedi 11 mars, voire aussi le 15 mars par l'Intersyndicale.