Retraites. Les enseignants en colère fortement mobilisés

Publié : 17 janvier 2023 à 22h20 - Modifié : 17 janvier 2023 à 22h27 par Dolorès CHARLES

Ecole Bois du Château (Vacances apprenantes)
Crédit : Yann Launay

Alors que la journée de mobilisation contre la réforme des retraites, présentée en Conseil des ministres le 23 janvier, se profile, les enseignants sont déjà mobilisés. Dans le public comme dans le privé, certaines classes seront fermées, voire des écoles. Le point avec le SNES du Finistère et le témoignage d'enseignants inquiets.

La mobilisation s'annonce très forte ce jeudi 19 janvier dans l'Education nationale, pour la première grande journée d'action nationale contre la réforme des retraites. Il faut dire que pour les enseignants, le moment est doublement décisif : c'est ce mercredi que redémarrent les négociations salariales. Pour les syndicats, il y a urgence à augmenter les salaires, à améliorer les conditions de travail, pour rendre le métier d'enseignant plus attractif...

"Je ne toucherai jamais ma pension complète"

Pour Yves Pasquet, 61 ans, professeur en lycée technologique à Quimper et secrétaire départemental du syndicat SNES 29, la réforme des retraites va dans le sens contraire. Pour lui cette réforme ne fera qu'aggraver la souffrance au travail et l'appauvrissement des personnels :

"Actuellement les collègues en ont déjà assez à 60 ans. Beaucoup de collègues partent avec de la décote et j'en ferais partie! Je ne toucherai jamais ma pension complète, ce n'est pas possible parce qu'il faudrait que je travaille jusqu'à 66 ans et il en est hors de question. On court après le temps pour transmettre, régler les problèmes, etc. On vient greffer là-dessus tout un tas de réunions, de réformes et la charge de travail demandée est actuellement, beaucoup plus importante que dans le temps. Les gens vont craquer, ils partiront plus tôt avec évidemment de la décote. Ils partiront plus tôt avec des périodes de chômage et d'arrêt maladie. Il est totalement illusoire de croire que les personnels pourront rester plus longtemps en activité dans les conditions de travail que nous connaissons actuellement."

Yves Pasquet, secrétaire du SNES 29
Crédit : Yann Launay

Une question d'idéologie

Pour Yves Pasquet, cette réforme n'a rien d'un ajustement comptable ou d'une modification à la marge. Pour l'enseignant breton, cette réforme accélère un changement profond, et trahit l'idéal porté par les fondateurs du système, en 1945 : "le Conseil de la Résistance quand il a mis en place la Sécurité sociale et les retraites, c'était dans l'idée aussi que les salariés puissent avoir une deuxième vie, au cours de laquelle ils profiteraient du temps restant pour des loisirs créatifs et culturels, pour passer du temps en famille... Actuellement, le projet de retraite proposé est un projet où les salariés vont travailler jusqu'au moment où ils ne pourront plus travailler. Dans l'Education nationale, les collègues partiront quand ils ne pourront plus !"

Yves Pasquet, secrétaire du SNES 29
Crédit : Yann Launay

Des écoles fermées ce jeudi

Le premier syndicat du primaire annonce 70% de grévistes, et certaines écoles resteront fermées (*), ce jeudi. C'est le cas de l'école où travaille Sophie, 22 ans, qui achève sa formation de professeur des écoles. Sophie est bien sûr encore éloignée des calculs de retraite, mais cette réforme l'inquiète : "64 ans, ça me semble très lointain. C'est un travail très prenant au quotidien et je me dis que jusqu'à 64 ans, ça me semble compliqué... Je pense qu'on ne prend pas en compte tous les élèves à besoins spécifiques, les élèves qui ont des troubles, qui demandent une attention et un temps de préparation pour les séances assez conséquent. Actuellement, on est jeunes et on a beaucoup d'énergie à donner, donc on arrive à encaisser tout ce qui peut se passer dans une journée,mais peut être qu'à 64 ans, on n'aura pas toute cette énergie."

(*) Le public n'est pas le seul concerné, car on annonce aussi plus rare des enseignants grévistes dans le privé.

Sophie
Crédit : Yann Launay

43 ans de cotisation : "on ne voit pas comment on va les faire"

Yann Foucher sera dans le cortège quimpérois, jeudi matin. Cet enseignant en école élémentaire est résolu à combattre une réforme qu'il juge injuste, irréaliste, sans aucune prise en compte de la difficulté du métier d'enseignant : "imaginez vous avoir à vous occuper de 25 enfants, tous quand même relativement en forme pendant 24 h en face à face, et avoir un taux horaire par semaine en moyenne de 45 h pour un enseignant, 55 h pour un directeur ou une directrice. Pendant le Covid, on a eu le retour de parents qui ont fini par me dire "mais comment vous faites ? Parce qu'ils se retrouvaient coincés pendant des semaines entières avec leurs enfants à la maison... Quand on voit les collègues qui vont partir cette année à 62 ans, ils ont déjà eu l'impression d'en avoir fait trop... 43 ans de cotisation, on ne voit pas comment on va les faire."

Yann Foucher, enseignant à Quimper
Crédit : Yann Launay

Yann Foucher espère une mobilisation massive ce jeudi, dans tous les secteurs d'activité, pour dire non à une réforme cynique : "le but de cette réforme est de récupérer de l'argent, à n'importe quel prix et sur le dos des mêmes...elle est injuste. On ne peut pas se souhaiter les uns les autres tous ensemble, de ne pas avoir de retraites en bonne santé."

Les rassemblements jeudi 

A Quimper, le rassemblement est prévu à 10h30, place de la Résistance, ce sera à 10h30 à Brest place de la Liberté, 10h à Lorient à la Maison des syndicats, 10h30 à Nantes au Miroir d'eau, à 11h à Rennes, Esplanade Charles de Gaulle ou à 14h à Saint-Brieuc, place de la Liberté. D'autres points de rendez-vous sont fixés à Ancenis (10h à la station Esso), à Angers également 14h place Leclerc et à Cholet (10h30 av du Maréchal Leclerc), mais aussi à Laval 11h place la Trémoille, à La Roche sur Yon, 14h place Napoléon, à La Rochelle (14h30 parvis de la gare) et à Tours (10h place de la Liberté).