Immobilier : la Bretagne a (trop) la cote !

Publié : 24 février 2021 à 7h39 - Modifié : 7 octobre 2021 à 9h45 par Dolorès CHARLES

HIT WEST
Crédit : Yann Launay

DOSSIER IMMOBILIER : comment se porte le marché de l'immobilier en Bretagne, quels sont les acheteurs, et les secteurs les plus impactés par la hausse des prix ? Le(s) confinement(s) pèse(nt)-t-il(s) sur les choix des acquéreurs de biens. Reportage de Yann Launay.

Les prix de l'immobilier continuent de grimper, en Bretagne et pas seulement sur le littoral : les chiffres montrent que l'augmentation s'est accélérée, en 2020, et qu'elle se propage désormais dans l'intérieur des terres. Les maisons sont tout particulièrement recherchées, il semble bien que les deux confinements de 2020 aient accéléré la tendance. Et si parmi les communes où l'on enregistre les hausses les plus fortes, on trouve, logiquement, des communes du littoral comme Saint-Philibert, dans le Golfe du Morbihan (+20 % du prix médian des maisons individuelles, selon les chiffres des notaires), ou Combrit près de Pont-l'Abbé (+19,1 %), la tête du classement réserve aussi des surprises.

Un marché tendu à Baud et environs

Baud, une petite ville de 6.000 habitants à 30 km au nord-est de Lorient, enregistre une hausse de 17,7% en 2020, et plusieurs communes aux alentours connaissent aussi une tension du marché de l'immobilier : une situation nouvelle pour cette zone géographique, comme le confirme Jean-Marc Bouillon, mandataire immobilier sur le secteur depuis une dizaine d'années :

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"Vous avez beaucoup plus de demande, et il y a beaucoup moins de négociation. J'ai même eu, il n'y a pas longtemps, une personne qui offrait plus que ce qui était affiché... Vous avez un effet de ciseaux : d'un côté, en 2019, beaucoup de maisons avaient déjà été vendues, 2020 il y a eu l'effet de la pandémie... Et pendant cette période vous avez des vendeurs qui ont retiré de la vente... Parce qu'ils ont le même problème : "qu'est-ce qu'on va acheter, qu'est-ce qu'on va trouver ?"... Il y a eu un effet de raréfaction que je n'avais jamais vu..."

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Beaucoup de parisiens migrent vers la Bretagne

Les acheteurs viennent de grands métropoles de l'Ouest, mais aussi d'Ile de France :

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"On a beaucoup plus de Parisiens, qui migrent vers la Bretagne. Ils ont le choix entre aller vers la côte, mais c'est horriblement cher, et ça ne s'est pas amélioré, ou aller un peu plus loin dans l'intérieur des terres. Cela permet pour eux de trouver des maison qui ont des rapports qualité-prix impensables : pour le prix d'un appartement à Paris, ici vous avez une maison avec 5-6 chambres, un terrain de 5-6.000 m2 et pas si loin de la mer..."

Ce phénomène est-il durable ? Doit-on craindre un retournement du marché, dans ce secteur aux portes du centre-Bretagne ? 

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"On peut imaginer que cela continue à monter, mais on peut aussi imaginer un retournement de situation, s'il y a un chômage de masse, les banques ne prêteront pas, vous aurez des gens qui ne pourront plus acheter... Il est possible, comme au début des années 2010, que l'on se retrouve avec beaucoup plus de maisons à vendre que d'acquéreurs..."

Le principe de l'offre et la demande

En attendant, les prix grimpent et les biens se font de plus en plus rares. La concurrence n'a jamais été aussi forte entre professionnels de l'immobilier :

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"Vous avez énormément de mandataires qui arrivent sur le marché... Avec la pandémie, il faut penser que des gens qui arrivent à la cinquantaine auront beaucoup de mal à retrouver un boulot, et un boulot qui peut paraître simple, c'est de faire agent immobilier, agent mandataire... Cela a commencé l'année dernière, mais là il y en a de plus en plus... Toutes les semaines vous avez des gens nouveaux qui arrivent sur le terrain, vous avez aussi des mandataires qui habitent loin mais qui viennent ici, qui cherchent dans l'arrière-pays ce qu'ils ne trouvent pas à Lorient ou à Vannes..."

La hausse des prix gagne le centre-Bretagne

Cette augmentation des prix, cette pression sur les maisons individuelles, gagne le nord et concerne désormais des secteurs du centre-Bretagne. Les acquéreurs ne sont plus des Anglais, comme l'explique Michel Pourchasse, maire de Saint Thuriau, une commune de 2.000 habitants proche de Pontivy :

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"Cela peut être des retraités qui viennent souffler, des gens qui quittent Paris, des personnes de tous horizons. Il y a une deuxième catégorie, plutôt de jeunes couples qui ont du courage pour rénover... Et on a peut-être un début d'exode urbain : il y a beaucoup de jeunes qui se sont installés, en permaculture par exemple : les gens veulent la nature, mais aussi se mettre à leur compte, ne plus être salariés, même si le revenu est moindre... Il y a un vrai phénomène..."

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Michel Pourchasse, maire de St-Thuriau

Quel est le regard d'un maire comme Michel Pourchasse sur l'arrivée de ces nouveaux habitants venus de grandes métropoles ou d'autres régions françaises ? :

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"Ce qui est intéressant, c'est que ça nous permet de voir des générations -qu'elles soient du troisième âge ou de jeunes couples- venir sur notre territoire... Cela a un effet pour faire vivre les écoles, sur le commerce local... Ce brassage de générations va créer de la solidarité, ça permet de garder notre territoire agile, vif..."

Des efferts pervers à craindre ?

Mais jusqu'où peut aller cette augmentation des prix ? Des effets pervers sont-ils à craindre :

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"Je pense qu'on peut avoir un peu de tension, mais les prix ne vont pas doubler... Saint Thuriau ne sera ni Vannes ni Cannes... L'équilibre va se faire assez naturellement... Peut-être que les gens qui ont vraiment les moyens n'ont pas envie de venir ici non plus... On a encore du temps devant nous : même si ça augmente de 10, 20, 30%. Une maison de 100 000 euros, si elle se vend 130 000 ou 140 000 demain, ça fait beaucoup, mais ça laisse encore une capacité à des personnes du coin, ou d'ailleurs, à y vivre quand même..."

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Parmi les nouveaux habitants de Saint Thuriau : Nathalie et Gérard, fraîchement retraités, qui ont quitté l'Oise l'été dernier pour s'installer dans le Morbihan. Ils souhaitaient quitter la région parisienne, et la pandémie a accéléré leur départ pour la Bretagne :

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"Au début ce n'était pas notre premier choix, on avait pensé partir sur la Vendée, sauf que c'est un peu bétonné, maintenant, la Vendée, ici c'est resté un peu plus sauvage. Quoi qu'il en soit, on avait décidé de partir, on voulait un peu plus de calme, passer une retraite plus clémente... Au départ, on voulait être plus près de la mer, mais c'est plus cher, et puis bon, il y a la foule des vacances, sur la côte..."

Et six mois après leur installation à Saint Thuriau, leur nouvelle vie est-elle à la hauteur de leurs attentes ? :

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"Impeccable, je suis contente, je me plais bien... L'environnement me plaît... Pontivy qui est très sympa... On a déjà des amis... La mentalité, c'est autre chose : c'est beaucoup plus sévère, dans l'Oise, c'est chacun pour soi... Je suis très bien ici, je ne rebouge plus... J'ai l'impression que cela fait des années que je suis là... J'ai un petit problème, quand même : je n'arrive pas à trouver un dentiste !"

Un dossier signé Yann Launay.