Loup repéré dans les Monts d'Arrée : les éleveurs ovins pas si inquiets

Publié : 16 mai 2022 à 8h44 - Modifié : 16 mai 2022 à 8h53 par Dolorès CHARLES

Thierry Piers, éleveur ovins
Crédit : Yann Launay

Alors que la présence du loup a été confirmée dans le Finistère, une première depuis plus d’un siècle, les éleveurs bretons interrogés par Yann Launay ne semblent pas si inquiets, surtout si la présence du canidé est limitée.

Les spécialistes en sont certains : c'est bien un loup qui a été filmé dans une zone naturelle des Monts d'Arrée, à Berrien, dans le Finistère. Tout proche des zones où les derniers loups de Bretagne avaient été vus, fin XIXème, début XXèmez siècle. Il s'agirait d'un loup solitaire de souche italienne. Et chez les éleveurs de moutons de la région, pas de vent de panique, mais des interrogations, comme pour Thierry Piers, qui élève avec sa femme Mireille 500 brebis à Plévin, près de Carhaix :

"Si demain il arrive dans mon troupeau et me tue 30 brebis, c'est sûr que je vais avoir un problème. Mais bon le cas, je l'ai eu avec les chiens, puisque les chiens errants tuent autant, voire certainement plus que les loups en France. On a eu trois attaques de chiens, une fois on a dû perdre 12 brebis, une autre fois 4 ou 5, une fois 3. Le renard peut tuer un paquet d'agneaux aussi tous les ans. C'est dans la logique, bien sûr on essaie de limiter, mais on a souvent de la perte dûe à la prédation autre que le loup. Pour l'instant il n'y en a qu'un... C'est vrai que s'il commence à y avoir des meutes de façon importante, ça risque de poser problème."

Thierry Piers
Crédit : Yann Launay

Chien, berger ... comment se protéger ? 

A Plévin, près de Carhaix, Thierry Piers et sa femme Mireille élèvent leurs brebis, principalement en extérieur, sur une centaine d'hectares de pâturages. Depuis l'annonce de cette observation d'un loup, ils n'ont rien changé à leurs habitudes. Pas question de patrouilles nocturnes avec fusil et lunettes infrarouges, même si Thierry le reconnaît, son troupeau est vulnérable :

"On est en système dynamique, on va tous les jours avancer les filets. Mais le filet ne fait que 90 cm - 1m de haut, c'est du filet électrifié, mais le loup ce n'est pas ça qui va le déranger. Bon maintenant, s'il faut prendre des piquets un peu plus hauts, pourquoi pas, cela ne va pas nous changer la façon de travailler... Chiens de protection ? Peut-être, mais si on commence à rentrer dans un système avec des patous, nous la ferme est entourée d'un chemin de randonnée : dans le Sud-est, par exemple, des randonneurs sont attaqués par des patous, le patou défend son territoire... Après l'éleveur non seulement à des problèmes avec le loup, mais il a des problèmes avec le randonneur... On n'a pas de berger : s'il faut que j'emploie quelqu'un pour garder mes brebis, économiquement ça ne passera pas, ou alors il faudrait qu'il soit payé entièrement par l'Europe."

Le Cloitre St-Thegonnec - Monument aux loups
Crédit : Yann Launay
Thierry Piers
Thierry Piers
Crédit : Yann Launay

Une présence limitée du loup

Une pointe d'inquiétude existe chez des éleveurs ovins comme Thierry, mais il ne veut pas exclure la possibilité d'une coexistence avec le loup : "Le loup, personnellement, s'il ne me fait rien, pour la biodiversité, c'est important. Comme je dis, des écureuils parfois j'en revois, je n'en voyais pas depuis 10-15 ans. Des geais, on n'en voyait plus, on en revoit. Bon, le loup, si on se limite à 2 ou 3 sur toute la Bretagne, je ne pense pas que ça puisse poser de gros problèmes. Bien sûr il ne faudrait pas qu'il y en ait 300... Comme disent certains éleveurs, on n'a pas des troupeaux pour les laisser manger par des prédateurs."

Thierry Piers
Crédit : Yann Launay

"Qu'il vive paisiblement son séjour à Berrien"

Le maire de Berrien n'a pas eu d'appel d'éleveurs angoissés. Pour Hubert Le Lann, les risques sont limités. Ce loup pourrait être simplement de passage, et même s'il s'installait durablement, il n'y aurait rien d'inquiétant, à ses yeux.

"En tous cas la zone où le loup a été repéré, c'est une zone où il a de la nourriture à foison, il y a du gibier et c'est très difficile d'accès, même les chasseurs n'y vont pas trop. Alors s'il se plaît là, pourquoi pas ? Il n'est pas loin du musée du loup. Nous, ça ne nous dérange pas plus que ça : on sait pertinemment qu'il ne va pas venir attaquer les êtres humains... Et ce n'est pas nous qui allons l'embêter, et qui allons non plus dévoiler là où il se trouve : les chemins d'accès, choses comme ça, au contraire on essaie de faire en sorte que cela se se sache pas, et qu'il vive paisiblement son séjour à Berrien."

Le maire de Berrien (29)
Crédit : Yann Launay

Toute observation suspecte doit être signalée

Pour la Préfecture du Finistère, c'est dans "la journée du 4 mai 2022, qu'un grand canidé a été filmé, par un appareil automatique, sur la commune de Berrien. Si la présence du loup dans le Finistère est une première depuis plus d’un siècle, l’espèce est connue pour sa grande capacité de dispersion. Ainsi, depuis le retour du loup en France dans les Alpes du Sud en 1992, l’espèce s’est installée sur les principaux massifs montagneux français. Elle est ponctuellement mais régulièrement aperçue sur des territoires éloignés du cœur de population alpin, comme ça a été le cas dans les départements de la Vendée, la Charente-Maritime, la Loire-Atlantique ou le Calvados...

Contact

L’Office français de la biodiversité dispose d’un maillage territorial d’agents spécialement formés à la reconnaissance des indices de présence du loup et aux expertises de constats d’attaques, y compris dans les départements bretons où la présence de loup n’avait jamais été avérée jusqu’à présent. Toute observation suspecte de grand canidé doit être rapidement signalé au service départemental compétent de l’OFB 29 : Service départemental du Finistère au 02 98 82 69 24 ou sd29@ofb.gouv.fr