Liffré. Le projet d'usine Bridor réunit de nombreux opposants

Publié : 19 octobre 2022 à 14h29 par Dolorès CHARLES

Pancarte Non à Bridor
Crédit : Inter-organisation contre le projet de Bridor

C'est un projet d'implantation d'usine en Bretagne, qui cristallise les critiques dans le contexte climatique et les interrogations actuelles sur notre belle planète en termes de surface ou d'eau. Alors que Le Duff veut ouvrir un site de production sur 21 hectares, à Liffré (35), une tribune réunissant une trentaine d'opposants vient d'être publiée, et une nouvelle mobilisation est prévue le 5 novembre.

Le projet Bridor compte de plus en plus d’oppositions. Une tribune signée par une trentaine d’associations, de syndicats (dont la Confédération Paysanne), de partis politiques (EELV, LFI) et même de boulangeries vient d’être publiée pour dénoncer le projet d’implanter un site de production de pains et viennoiseries industrielles surgelées à Liffré, en Ille-et-Vilaine. Un projet porté par le groupe breton Le Duff, qui compte déjà deux usines dans le secteur à Servon (35) et à Louverné (53).

Des espèces menacées

Alors que plusieurs recours sont engagés devant les tribunaux une inter-organisation appelle à se mobiliser le samedi 5 novembre 2022, devant la mairie de Liffré. Pour les opposants, les raisons de dénoncer ce projet sont multiples : d’un point de vue écologique d’abord avec la destruction de zones humides, l'artificialisation des terres (21 hectares), et un dommage à terme pour la faune et la flore, selon Philippe Rocher, porte-parole de l’inter-organisation, joint par Dolorès Charles : "on est déjà sur un site, où il y a des terres agricoles où il y a des espaces naturels. Déjà, on est en contradiction avec tous les discours politiques qu'on peut entendre depuis des années. On est sur un site où les espèces protégées sont assez nombreuses, il y a une dizaine d'espèces qui ont été recensées. On va être sur de la destruction d'habitats. On est sur un territoire où les haies bocagères de qualité ont été préservées et des chênes centenaires aussi... La liste, en fait, est assez longue et ce projet va impacter forcément de façon négative tous ces éléments que je viens de décrire."

 

Philippe Rocher, porte-parole de l’inter-organisation
Crédit : Dolorès Charles

La préfecture brétilienne a donné son autorisation environnementale le 1er juillet dernier, et le permis de construire a lui été signé par la mairie de Liffré le 12 juillet. Des étapes clefs mais des recours sont engagés (*) et les travaux sont loin de commencer.

Depuis quelques mois, le breton Le Duff a fait des concessions par rapport au projet initial, sur l'eau notamment mais l'impact sur la ressource restera majeur : 180 000 m3 d'eau seront nécessaires par an pour la production. Pour Philippe Rocher, "sur la question de l'eau potable, puisque la législation fait qu'aujourd'hui ils sont obligés d'utiliser de l'eau potable dans leurs process, on vient prélever de nouveau de l'eau dans une ressource qui est en tension. Malgré tous les discours qu'on peut entendre, la réalité l'a malheureusement démontré cet été avec cette fameuse manifestation des effets du dérèglement climatique... Et toute la communauté scientifique nous dit depuis déjà extrêmement longtemps que ce sont des phénomènes qui vont être amenés à se répéter, à s'amplifier."

Philippe Rocher, porte-parole de l’inter-organisation
Crédit : Dolorès Charles

Un modéle économique révolu

Le groupe Le Duff dispose d’une chaîne logistique très émettrice en CO2, en amont comme en aval, car l’usine exportera vers l'Asie et l'Amérique… Un modèle économique et écologique révolu pour Philippe Rocher : "l'empreinte carbone de Bridor équivaut à 500 A330 pour des Airbus A330 qui font le tour du monde par an. Effectivement, on est bien loin de toutes les préconisations, que ce soit scientifiques avec le GIEC, avec les associations, que ce soit même avec l'État qui a développé les stratégies bas carbone. Et pourtant, on a un préfet qui donne une autorisation d'exploiter pour que ce type d'industrie voie le jour et ce n'est même pas en plus sur une friche industrielle... Il y a énormément de contradictions qui sont pointées et qui nous font dire qu'aujourd'hui continuer à soutenir ce modèle de développement est tout à fait incohérent."

Philippe Rocher, porte-parole de l’inter-organisation
Crédit : Dolorès Charles

Un recrutement difficile

Le breton Duff emploie plus de 35.000 personnes, pour un chiffre d'affaires de 2 milliards d'euros (2019), il compte deux usines dans l’ouest à Servon (Ille-et-Vilaine) et à Louverné (Mayenne). Pour les partisans du projet, dont certains élus locaux, Bridor créerait 500 emplois, mais ce n’est pas un argument valable car Bridor peine déjà à recruter sur ses autres sites de l'ouest : "ils ne mentionnent pas qu' à l'usine de Servon-sur-Vilaine et c'est le cas aussi à Louvernéen Mayenne, il y a une centaine d'emplois qui ne sont pas pourvus... et ce, depuis plus d'un an déjà, que tout le secteur de l'industrie agroalimentaire est en grande difficulté pour les recrutements, parce que la manœuvre n'est pas en face actuellement. Liffré est un territoire où on est quasiment en plein emploi, et c'est une réalité aussi sur un bassin qui va de Vitré en passant par Rennes."

Philippe Rocher, porte-parole de l’inter-organisation
Crédit : Dolorès Charles

Les opposants à l'usine Bridor de Liffré proposent un projet plus résilient et alternatif, en lien avec l’autonomie alimentaire et énergétique du territoire. La prochaine mobilisation aura lieu le 5 novembre devant la mairie de Liffré.

Plusieurs recours en justice sont déposés (*) :

-un recours contre la modification du Plan Local d'Urbanisme de Liffré
-un recours contre le Permis de Construire
-un recours devrait suivre contre l'arrêté préfectoral d'autorisation d'exploiter