Les laboratoires en grève doivent rendre 1,3 milliards d’euros
Publié : 10 janvier 2023 à 10h05 - Modifié : 11 janvier 2023 à 8h45 par Emilie PLANTARD
Les principaux laboratoires d’analyse médicale sont de nouveau fermés depuis ce lundi matin pour cause de grève. Les professionnels refusent l’injonction de l’Etat à rembourser un excédent d’1,3 milliards d’euros engrangé depuis la crise Covid. Eux veulent négocier et proposent une somme de 700 millions d’euros, plus raisonnable selon les syndicats.
Le ministre de la santé parle de "bénéfices hors-norme" pendant la période Covid. Les laboratoires privés d’analyse médicale sont donc priés de rendre une partie du butin à la Sécurité Sociale, soit 1,3 milliards sur trois ans, non pas en faisant un chèque, mais en baissant progressivement les tarifs des actes courants. Cela devrait aboutir à une économie de 250 millions d’euros en 2023. Les laboratoires, de leur côté, ne nient pas une rentabilité exceptionnelle. Mais ils contestent la méthode et l’impact sur leur avenir.
Le Dr Jérôme Besson est biologiste à Nantes et président du directoire du groupe Bioliance. "Les laboratoires étaient prêts à redistribuer 650 millions sur les 1,3 milliards que l’Etat demandait. Ce qu’ils demandent c’est une visibilité sur 3 ans et non pas une baisse brutale qui va nous mettre dans une situation compliquée avec vraisemblablement 400 fermetures de sites et 10.000 emplois perdus sur ces 3 années."
Les laboratoires vont donc devoir baisser certains actes de 7,5% en 2023, puis de nouveau 7,5% en 2024. Un accord doit être trouvé sur les actes concernés.
Baisse de chiffre d’affaire
Cette grève est très suivie, près de 80% des laboratoires sont fermés cette semaine. Au-delà du remboursement, les professionnels dénoncent une baisse durable de leurs revenus. "On ne nous demande pas du tout de faire un chèque, explique Jérôme Besson, le concept c’est une baisse toute simple des tarifs de la biologie. Qui dit baisse dit baisse dans le temps, qui sera doublée l’année prochaine et qui sera pérenne. Cela implique une perte importante de chiffre d’affaire tout en ayant la même activité.
Le revers de l’Etat
Le coup est dur pour les laboratoires qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour faire face à la crise Covid. Ils vont pourtant devoir rendre le fruit de ces efforts, voire même un peu plus avance Jérôme Besson interrogé par Emilie Plantard : "au final ça fera 1,3 milliards de baisse alors que pour le Covid alors que les laboratoires ont fait 850 millions de bénéfice. Nous avons répondu au pied levé à la demande du gouvernement pour mettre fin à la pandémie. Auprès des écoles, des entreprises, de la vie sociale. On ne maîtrisait pas le prix, ni le nombre de tests mais l’esprit d’entreprise a transformé une catastrophe industrielle en vrai succès économique, cela a profité aux laboratoires. Aujourd’hui on nous le reproche et c’est difficile à digérer."
Une organisation différente
C'est un manque à gagner important pour les laboratoires qui vont devoir s’adapter. Actuellement, ils réalisent aussi la prise de sang, un acte qui n’est pas forcément très rentable. Ils vont donc peut-être devoir y renoncer à l’avenir, pour se concentrer sur l’analyse biologique. Avec les conséquences que ça impliquerait pour les patients. "Les baisses de tarifs vont faire que on va s’adapter puisqu’on est une entreprise privée, admet Jérôme Besson. Pour la rendre rentable il va falloir faire rentrer plus de gens dans les créneaux horaires et disperser vers les infirmières tout ce qui est prélèvement. Il y aura forcément un délai d’attente au laboratoire et attendre des prises de sang qu’on peut faire du jour au lendemain et pour lesquelles on devra attendre 2, 3 ou 6 mois..."