Mayenne : Vers une restructuration de la psychiatrie à l'hôpital ?

Publié : 15 mars 2023 à 8h54 - Modifié : 15 mars 2023 à 16h45 par Emilie PLANTARD

HOPITAL MAYENNE
Centre hospitalier du Nord-Mayenne, à Mayenne
Crédit : Google Street

Face au manque important de soignants, l’Agence Régionale de Santé imagine restructurer l’organisation de la prise en charge hospitalière en psychiatrie sur le département de la Mayenne. Un recul considérable pour le syndicat FO, qui dénonce un manque d’ambition.

La psychiatrie est en crise en France et en particulier en Mayenne, où l’ARS a demandé une expertise en fin d’année dernière. Cette étude externe a abouti à des préconisations, parmi lesquelles une réorganisation des services pour pallier le manque de soignants. Actuellement, trois centres hospitaliers accueillent des services psychiatriques, à Laval, Mayenne et Château-Gontier, et ces trois établissements ne comptent plus que sept médecins psychiatres en équivalent temps plein. Cette pénurie a déjà conduit la direction à fermer des lits, et à en geler d’autres... malgré tout, les conditions d’accueil et de travail sont dégradées.

Une situation critique

Sylvain Bihel, infirmier en psychiatrie à Laval et secrétaire adjoint chez FO : "juste avant le Covid, nous avions plus de 8 équivalents temps-plein, rien qu’à l’hôpital de Laval. Et là on se retrouve à 7 dans tout le département. Cela montre la situation assez critique. Alors que déjà, on n’était pas hyper bien dotés par rapport à d’autres endroits... En parallèle, se greffe une difficulté à recruter des infirmiers donc il y a là aussi un sous-effectif. Au-delà de travailler en sous-effectif, on subit le fait que le médecin ne soit plus aussi disponible qu’avant, pour venir en appui, évaluer un patient, répondre à nos interrogations - on est davantage isolés face au patient et à ce qu’on peut lui proposer."

Sylvain Bihel, infirmier en psychiatrie à Laval et secrétaire adjoint chez FO
Crédit : Emilie Plantard

Une situation d’urgence qui dure...

Sylvain Bihel, secrétaire adjoint FO, constate que dans un tel contexte, la prise en charge des patients est dégradée mais les équipes font ce qu’elles peuvent et ne peuvent souvent gérer que les urgences. "On est obligés de se concentrer là-dessus, c’est-à-dire qu’aujourd’hui, les patients qui souffrent d’une maladie chronique, une dépression, une psychose, une schizophrénie ou autre mais qui sont stabilisés et qui auparavant avaient l’opportunité de voir leur médecin psychiatre tous les 2 ou 3 mois, ces patients sont vus maintenant au mieux une ou deux fois par an. Derrière, c’est une prise de risque pour le patient et l’accueil du nouveau patient, pour ceux qui ne sont pas venus, devient plus compliqué. Ils sont obligés de passer par les urgences pour voir un psychiatre dans des délais raisonnables, c'est la conséquence."

La Mayenne est pourtant le 2ème département recensant le plus de suicides dans la région Pays-de-la-Loire, avec un taux de 25,2 pour 100.000 habitants en 2015, c’est 60% de plus que la moyenne nationale. Le département a dénombré 66 suicides en 2020, c’est 3 à 4 fois plus que de morts sur la route...

Sylvain Bihel, infirmier en psychiatrie à Laval et secrétaire adjoint chez FO
Crédit : Emilie Plantard

Des recommandations pour les établissements mayennais

L’Ars préconise notamment de regrouper les urgences et centraliser l’hospitalisation aigüe à Laval et ainsi permettre de mutualiser les médecins. Pour le syndicat FO c’est la mort de la proximité des soins en psychiatrie adulte. "La réponse de l’ARS, selon Sylvain Bihel, pour structurer la psychiatrie pour les prochaines années, est de tout regrouper. Ils parlent même d’aller vers la structuration d’organisation territoriale, tout ça on voit bien que ça ne se fait pas juste pour gérer une urgence. En gros, faites avec les moyens que vous avez et organisez-vous de façon à limiter la casse. Et nous ce qu’on pointe, c’est l’absence totale de perspective positive. Pour nous, la réponse aurait été plutôt : il y a une crise, il faut s’y adapter mais demain, qu’est-ce qui est proposé, comment fait-on pour former plus de médecins. Comment fait-on pour permettre aux collègues de bosser dans de bonnes conditions et attirer des infirmiers ? C’est totalement occulté."

Sylvain Bihel, infirmier en psychiatrie à Laval et secrétaire adjoint chez FO
Crédit : Emilie Plantard

Les 17 recommandations ont été présentées mi-décembre aux équipes. A ce jour, la direction du groupement hospitalier de la Mayenne et du Haut-Anjou n’a pas pris de décision.