Il y a 10 ans, le mariage s'ouvrait aux couples homosexuels

Publié : 16 mai 2023 à 22h12 - Modifié : 17 mai 2023 à 10h07 par Emilie PLANTARD

Virgil, devant la photo de son mariage avec Loïc en mai 2013, au Croisic
Virgil, devant la photo de son mariage avec Loïc en mai 2013, au Croisic
Crédit : Emilie Plantard

Le 17 mai 2013 était promulguée la loi Taubira qui autorisait le mariage des personnes de même sexe, après des semaines de manifestations d’opposants aux propos parfois virulents. Quelques jours après, un couple de croisicais s’unissait devant le maire, ils étaient les premiers dans l’ouest.

C’est aujourd’hui 17 mai, la journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie. Rappelez-vous, le même jour, il y a tout juste 10 ans, la France ouvrait le mariage civil aux personnes de même sexe, après des semaines de contestation. La loi dite Taubira était en effet promulguée le 17 mai 2013, un geste fort qui allait changer la vie de nombreux couples, plus de 7000 mariages ont ainsi été célébrés en 2022.

(Nous étions) "surtout heureux que la société aille dans le bon sens"

Dans l’ouest, c’est au Croisic (44) que le premier mariage a eu lieu, le 31 mai 2013. Virgil et Loïc s’aimaient depuis 15 an, ils étaient déjà pacsés mais rêvaient de se marier pour se protéger. A l’époque, ils étaient le deuxième couple français à se passer la bague au doigt et leur union avait été largement médiatisée... Aujourd’hui, Virgil est veuf, il vit à Nantes et garde un très beau souvenir de cette journée exceptionnelle. "La question ce n’était pas de faire de concours ni quoi que ce soit, précise t-il, nous étions excités de le faire, c’est tout. On était heureux et même certains croisicais, des jeunes, étaient fiers de voir qu’au Croisic, il y avait une ouverture d’esprit. Il y en a quand même qui ont glissé quelques petites lettres, qu’on a vite mis dans la cheminée pour ne pas se tâcher les doigts. On n'a fait pas attention à ça et on a profité des bons moments... Pour nous c’était une chose tout à fait normale. (Nous étions) heureux mais surtout heureux que la société aille dans le bon sens."

Virgil Beldie, marié à Loïc en 2013
Crédit : Emilie Plantard

Une période difficile pour toutes les personnes LGBT+

Mais 10 ans après, personne n’a oublié la violence de ces manifestations d’opposants. Plusieurs centaines de milliers de personnes avaient défilé dans les rues, avec des slogans souvent très durs. Faisant même reculer le gouvernement sur l’ouverture de la PMA pour les couples de femmes. Violette Cordaro est la présidente de l’association Nosig pour les personnes LGBTQIA+ à Nantes, et elle garde un souvenir difficile de cette période. C'était "vraiment violent, se rappelle t-elle, parce qu’il y avait la volonté de renier l’existence même des personnes gays, de remettre en cause leur droit d’être des humains. Il ne faut pas oublier que c’était une époque où la parole était libérée, certains médias ont appuyé ces propos-là et en face il y avait des mouvements LGBT qui n’étaient pas construits ou qui ont été surpris par cette violence, qui n’ont pas eu le temps de s’y opposer. Et l’invisibilité des femmes à ce moment-là a fait que la PMA n’a pas pu passer en même temps que cette loi."

La loi de bioéthique, qui a ouvert la PMA aux couples de femmes, est passée en 2021.

Violette et Gwénola, de l'association Nosig
Violette et Gwénola, de l'association Nosig
Crédit : Emilie Plantard
Violette Cordaro est la présidente de l’association Nosig
Crédit : Emilie Plantard

10 après, les violences perdurent

Aujourd’hui, la question du mariage suscite moins de tensions. De nombreux opposants de l’époque ont d’ailleurs fait machine arrière, c’est le cas de Christophe Béchu, le ministre de la transition écologique et ancien maire d’Angers, qui dit regretter son vote contre le mariage pour tous.

A Nantes, le centre LGBTQIA+ Nosig reste très prudent sur le recul des opposants historiques, car si leur défiance concerne moins le mariage, l’homophobie est toujours très présente et la transphobie a même augmenté ces dernières années. "C’est exactement les mêmes, analyse Violette Cordaro, présidente de l’association Nosig, avec les mêmes personnes qui aujourd’hui ont changé de cible. Toutes ces menaces que le mariage allait faire écrouler la société, générer des enfants malades... 10 ans après ce n’est plus attaquable. On voit que la société n’a pas bougé, les enfants vont bien et les familles monoparentales sont intégrées. On peut donc difficilement maintenir ces attaques et c’est pour ça que c’est passé sur les personnes trans."

Violette Cordaro, présidente de l’association Nosig Nantes
Crédit : Emilie Plantard

"Il y a un fort taux de suicide chez les jeunes trans"

Pourtant si le mariage fait moins débat, les attaques envers les personnes trans se multiplient. L’association SOS homophobie parle même d’une explosion des violences en 2022, souvent chez des personnes jeunes, 14% des personnes ayant effectué un signalement auprès de l’association ont moins de 18 ans. Gwénola Cordaro gère la commission transgenre de l’association Nosig à Nantes, elle renforce son travail sur cette catégorie d’âge, particulièrement vulnérable. "Le combat c’est de pouvoir accompagner ces jeunes car il y a un fort taux de suicide chez les jeunes trans, qui est lié à leur non acceptation dans la société. Quand ils sont accompagnés par leur entourage, les lycées, leur environnement, le taux de suicide diminue de plus de 75%... On veut nous faire croire qu’en les accompagnant, on les met en danger mas c’est tout l’inverse."

Des marches des fiertés ont lieu un peu partout en France. C’était le cas à Angers ou Poitiers le week-end dernier, la Pride de Rennes aura lieu le 3 juin, celle de Nantes le 10 juin et Quimper le 1er juillet. Une première marche des fiertés sera aussi organisée à Redon le 1er juillet.