Guilvinec. L'aide au carburant des pêcheurs prolongée jusqu'en décembre, voire en 2024

Publié : 13 octobre 2023 à 11h39 par Dolorès CHARLES

Hervé Berville au Guilvinec, aux côtés du Préfet du Finistère
Crédit : Yann Launay

Petit sursis pour les pêcheurs de l'ouest : hier au Guilvinec, le secrétaire d’Etat chargé de la mer, Hervé Berville, a annoncé que l’aide au carburant, de 20 centimes par litre de gazole, qui devait prendre fin ce week-end, était prolongée jusqu’au 4 décembre.

Elle devait prendre fin ce dimanche 15 octobre : l’aide gazole pour les pêcheurs est finalement prolongée, au moins jusqu’au 4 décembre, et peut-être même en 2024. C’est ce que le secrétaire d’Etat chargé de la mer, le Breton Hervé Berville, a annoncé cette semaine (jeudi 12 octobre) aux pêcheurs qu’il a rencontrés au Guilvinec, dans le Finistère. Mais le prolongement en 2024 sera possible seulement si l’Union européenne donne son feu vert, et puis cette aide de 20 centimes par litre de gazole reste attribuée à une entreprise de pêche quel que soit son nombre de bateaux.

"Il faut continuer à travailler sur la pérennité de la pêche française ou alors elle va disparaître très vite"

De quoi laisser de nombreux armements breton sur le carreau, et de quoi laisser sur sa faim Stéphane Pochic, propriétaire de neufs bateaux côtiers basés à Loctudy et interrogé par Yann Launay : "nous sommes dans une tempête incroyable au niveau de la pêche française et je regrette... j'ai entendu certaines annonces, mais moi je ne suis pas satisfait des annonces ! A très court terme jusqu'à la fin de l'année, il y a ces fameux 0,20 € (vingt centimes) qui vont être prolongés mais pour le reste, il y a encore du chemin à faire. Nous allons laisser les politiques travailler avec la Région, l'État, le Département et il faut continuer à travailler sur la pérennité de la pêche française, ou alors elle va disparaître très vite."

Stéphane Pochic
Crédit : Yann Launay

La pêche doit être moins dépendante du pétrole

Pour Hervé Berville, la pêche doit évoluer pour être moins dépendante du pétrole, il faut adapter rapidement les navires, pour consommer moins de carburant, en attendant de pouvoir s'en passer. Et selon le secrétaire d'Etat, des solutions techniques existent déjà : vous avez ici au Guilvinec un navire qui consomme 30 % de moins parce qu'il a une motorisation hybride... On a lancé ce premier appel à projets et il y a plus d'une quinzaine de porteurs de projets, soit sur l'architecture du navire, soit sur la motorisation, des carburants alternatifs qui permettent de consommer moins. Le plan, qui a été lancé dans la transition énergétique du navire, est indispensable. Il faut l'engager dès maintenant parce que c'est en réduisant notre dépendance aux énergies fossiles qu'on pourra ne pas se retrouver dans une situation où on passe dans une gestion de la pêche, d'un plan de sortie de flotte, à des aides carburant. Ça, il faut arrêter !"

Le Guilvinec - bateau de pêche (proue)
Crédit : Yann Launay
Hervé Berville
Crédit : Yann Launay

Les armements peuvent difficilement passer à l'électrique en quelques mois, et les flottilles qui font la pêche au large, celles qui consomment le plus de carburant, ne voient plus comment s'en sortir.

Christophe Collin dirige l'armement Bigouden, basé au Guilvinec. Il fait naviguer 9 chalutiers, 70 marins, et se dit plus que déçu de la rencontre avec Hervé Berville : "on s'attendait à des aides substantielles, mais nous n'avons rien obtenu du tout. Le 15 octobre c'est dimanche, et je ne sais pas comment on va résoudre nos soucis. On va continuer à creuser notre trésorerie, mais il faudra bien qu'on trouve des solutions à un moment ou un autre. Economiquement, ce sont des activités très importantes puisque un emploi de marin représente 4 à 5 emplois directs à terre. On nous parle beaucoup de décarbonation, mais c'est le très long terme car à l'heure actuelle, nous n'avons pas la technologie. On fait partie de ce qu'on appelle la mobilité lourde, c'est à dire qu'on a besoin de capacité et de puissance, mais pour l'instant, on n'a pas la technologie."

Christophe Collin dirige l'armement Bigouden, basé au Guilvinec
Crédit : Yann Launay

Vers une pêche plus équitable

Si la hausse du prix du gazole pèse autant dans la balance des pêcheurs, c'est aussi parce que le prix auquel ils vendent leur poisson n'a rien à voir avec les prix pratiqués par les revendeurs. Des pêcheurs souhaiteraient que des mécanismes puissent être mis en place pour une pêche plus équitable, c'est la position de Stéphane Pochic : "je suis bouleversée de voir les prix qu'on affiche dans les poissonneries, alors qu'à côté le prix moyen est plutôt à la baisse pour nous depuis un an. Le prix aux consommateurs a explosé fois deux voire fois trois et ce n'est pas normal. Quand on vend un poisson sur la criée c'est une vente aux enchères, on ne répercute pas. Alors qu'avec la crise de l'Ukraine, tout le monde répercute les hausses !"

Stéphane Pochic
Crédit : Yann Launay

Des réunions sont programmées dans les jours qui viennent avec les collectivités bretonnes pour tenter de trouver une solution afin de soutenir l’ensemble des entreprises de pêche.