"Le Hamas n'est pas la Palestine" : la mise au point d'une historienne nantaise sur la guerre en Israël

Publié : 13 octobre 2023 à 11h11 - Modifié : 13 octobre 2023 à 15h53 par Tom ROSSI

Jérusalem
Crédit : Pixabay

Plus de 4 000 morts en moins d'une semaine. Après l'attaque du Hamas en Israël, les victimes civiles se multiplient des deux côtés. Grâce à une historienne nantaise, Hit West vous donne quelques clés pour comprendre le contexte qui entoure ce conflit vieux de 75 ans.

Le bilan de la guerre entre Israël et le Hamas continue de s'alourdir. Depuis samedi (7 octobre) et l’attaque du Hamas, 1 200 personnes sont mortes en Israël, dont 13 français et 1 500 dans la bande de Gaza, dont 500 enfants. S’ajoutent à cela les 1500 combattants du Hamas. Un conflit qui fait couler beaucoup d'encre et fait réagir les politiques français, car au sein d'un même parti type LFI, tous les élus n'ont pas la même position. Historiquement, la France a pourtant toujours joué un rôle diplomatique dans ce conflit né avec la création de l’Etat d’Israël en terre palestinienne il y a 75 ans.

Dépasser le cadre émotionnel en politique

Condamner l’horreur n’empêche pas de prendre de la hauteur, rappelle Jenny Raflik, professeure d’histoire contemporaine à l’université de Nantes, interrogé par Tom Rossi. "C’est vraiment important de rester rationnel et pour l’être il faut prendre du recul sur les événements. Mais, le problème c’est que le débat en France ne porte pas sur la question diplomatique. Il est très tourné sur une question politico-politicienne intérieure. Il faudrait dépasser ce cadre émotionnel, un peu irrationnel, voire hystérique de ces derniers jours où chaque parti s’accuse, pour essayer de se positionner à l’international et porter un message entendable de la part des deux camps... mais cela ne veut pas dire négocier avec le Hamas. L’intermédiaire serait plutôt l’autorité palestinienne."

Jenny Raflik, professeur à l’université de Nantes
Crédit : Tom Rossi

"Le Hamas, ce n'est pas la Palestine"

Le Hamas créé en 2007 "n’est pas la Palestine", insiste l’historienne nantaise. "C’est une organisation qui prétend représenter les Palestiniens, mais le Hamas défend ses propres intérêts et refuse la solution à deux Etats. Il demande l’éradication totale d’Israël, ce qui ne permet évidemment pas de discuter. En revanche, l’autorité palestinienne négocie depuis longtemps pour une solution à deux Etats: un Israëlien, un Palestinien."

Ce plan de répartition à deux Etats n’a jamais été respecté depuis la création d’Israël en 1948. C’est pourtant bien la position historique de l’Organisation des nations unies (ONU). L'autorité palestinienne est sur la même ligne que l’ONU et cette solution serait la voie de sortie du conflit. En face, ce n’est pas la position du gouvernement israelien d’extrême droite, qui étend ses colonies. Et la situation ne devrait pas s’arranger selon Jenny Raflik. "On peut craindre que ce regain de violences repousse les négociations car la réponse d’Israël est plus celle de la vengeance que de l’échange." 

Jenny Raflik, professeur à l’université de Nantes
Crédit : Tom Rossi

"Gaza est très pauvre et surpeuplée"

Israël, qui bombarde la bande de Gaza depuis lundi, a donné l'ordre ce vendredi (13 octobre) d'évacuer plus d’un million d'habitants du nord de Gaza vers le sud d'ici 24 heures. Une évacuation d'une telle ampleur est "impossible sans provoquer des conséquences humanitaires dévastatrices" selon l’ONU. Israël opère aussi un blocus strict de la bande de gaza. "Pas d'électricité, pas d'eau, pas de gaz, tout est fermé" indique l’armée.

De quoi empirer une situation sur place déjà extrêmement préoccupante. "Gaza est très pauvre et surpeuplée", souligne l’historienne. Il y a plus de deux millions d’habitants sur un petit espace. C’est l’une des densités les plus importantes au monde : plus de 6 000 habitants par km2 et surtout, plus de 60% de la population a moins de 18 ans avec l’un des taux de chômage les plus élevés au monde (70% pour les jeunes). C’est une population désoeuvrée qui ne voit pas de solution sociale et économique. Il n’y a pas de perspective d’avenir... C’est peut-être d’ailleurs du côté de l’économie que viendra la solution, analyse Jenny Raflik. Favoriser le développement économique de cette population pour lui donner une perspective d’avenir autre que la guerre."

Jenny Raflik, professeur à l’université de Nantes
Crédit : Tom Rossi

À Nantes et Saint-Nazaire, les rassemblements de soutien au peuple palestinien ont été interdits par la prefecture, idem à Brest ou Rennes. En revanche, le rassemblement en soutien à Israël organisé ce jeudi soir a pu se tenir devant la synagogue.