Finistère. Jonathan, ancien amateur d'urbex, veut sauver le Manoir de la Boissière

Publié : 16 mars 2023 à 8h48 - Modifié : 16 mars 2023 à 8h57 par Dolorès CHARLES

Manoir de la Boissière (29)
Crédit : Yann Launay

C'est dans le Finistère que Yann Launay a rencontré Jonathan, un jeune homme qui a découvert le Manoir de la Boissière alors qu'il pratiquait l'urbex (exploration de lieux interdits et abandonnés). Devenu intendant du domaine, il fait aujourd'hui tout pour le sauver, et vient de sortir un livre sur cette aventure.

Quand un amateur d'urbex tombe amoureux d'un manoir et décide de le sauver... C'est l'aventure que vit Jonathan, à Edern, près de Quimper. Lors d'une séance d'exploration, avec son appareil photo, Jonathan découvre le Manoir de la Boissière, une demeure du XIVème siècle, brûlée par les Bonnets rouges en 1675, et célèbre pour avoir appartenu notamment à la famille de l'écrivain Jean-Edern Hallier, qui y séjournait régulièrement. Racheté en 2002 par un homme d'affaires parisien, mais inhabité, le vaste manoir se dégradait, et recevait la visite de nombreux curieux, pas toujours respectueux des lieux.

Visite des lieux avec Jonathan

Jonathan, sous le charme de l'endroit, et indigné par le vandalisme, n'a pas hésité à contacter le propriétaire pour sauver le manoir. Une association de bénévoles a été créée, Jonathan est devenu intendant du domaine, et maintenant, c'est par la grande porte, de façon  tout à fait légale, qu'il entre et qu'il nous fait découvrir les lieux : "La première fois, je suis entré par la porte à l'arrière puisqu'il faut savoir, que c'était l'un des plus gros spots d'urbex du Finistère. On l'appelait à l'époque le château du piano, alors manoir de l'écrivain. Château du piano, parce qu'il y a un magnifique piano, qui a d'ailleurs été réparé par mes soins et des amis... suite à sa complète destruction. C'est un Pleyel de 1892. C'était un peu la signature de ce lieu là quand on prenait des photos, surtout avec cette grande cheminée en arrière-plan...

Je ne sais pas si c'est l'amour des lieux, la vieille pierre ou l'envie de stopper le vandalisme, montrer que c'est possible et qu'avec des bénévoles qui sont la plupart "urbexeurs", montrer que l'urbex ce n'est pas que du mauvais, c'est aussi des gens qui sont là pour sauver le patrimoine !"

 

Visite des lieux avec Jonathan
Crédit : Yann Launay

Des travaux pour mettre le manoir hors d'air

La démarche audacieuse de Jonathan n'a pas rebuté le propriétaire, le sulfureux homme d'affaires François Gontier : "quand il y a une personne qui l'appelle un soir à 19 heures, et qui lui propose de sauver son lieu et qui est motivé, je pense qu'il était très à l'écoute ! On s'est rappelé une nouvelle fois et on s'est donné rendez vous sur Paris. J'ai pris des photos sur la dégradation naturelle et puis il y a un autre dossier important c'est le vandalisme et le squat. On pouvait imaginer, par exemple, le manoir envahi de canettes de bière, des choses cassées, arrachées, etc. Je lui ai dit de figer les lieux, et de sécuriser. Il m'a donné carte blanche et m'a fait entièrement confiance... On a débité des planches de bois pour faire des fenêtres et on a fait de la peinture, de l'assemblage et bien maintenant, le manoir est hors d'air."

Manoir de la Boissière (29) avec Jonathan
Crédit : Yann Launay
Manoir de la Boissière (29)
Crédit : Yann Launay
Marie-Hélène au Manoir de la Boissière (29)
Crédit : Yann Launay
Jonathan
Crédit : Yann Launay

La transmission est importante

Jonathan et les autres membres de l'association ont nettoyé l'intérieur du manoir, fabriqué et posé des fenêtres temporaires, débroussaillé le parc, dégagé les dépendances... Un travail auquel participe Marie-Hélène, l'une des bénévoles : "il y a un attrait, et il y a quelque chose qui fait qu'on a envie de venir ici. On a envie de partager des choses ensemble et de sauver le lieu. Mais je ne serai plus de ce monde quand il sera sauvé. Il y a énormément de travail, mais en faisant petit à petit, il faut prendre plaisir chaque jour à venir... et puis il y a eu plein de choses qui se sont passées ici. Il faut le sauver et transmettre à nos petits enfants. Ma petite fille vient avec moi, il faut leur transmettre et ne pas laisser ce genre de lieu dans l'oubli."

Marie-Hélène
Crédit : Yann Launay

Le manoir breton n'est plus à vendre

Il y a encore trois ans, le manoir était un navire en perdition : de la mérule, un champignon qui ronge le bois, avait été découvert et avait englouti la somme que le propriétaire voulait consacrer à la rénovation. Les démarches pour classer le manoir au titre des monuments historiques avaient également échoué. A tel point que le propriétaire souhaitait se séparer du manoir, mais Jonathan et son association ont donné une impulsion décisive.

Désormais le Manoir de la Boissière n'est plus à vendre, et des projets sont à l'étude pour le faire revivre : "on a plein de projets qui sont en cours avec une dame, qui aimerait en faire éventuellement un centre culturel. On a d'autres personnes qui aimeraient en faire des séminaires, il y a plein d'idées et un énorme potentiel sur les lieux. On parle beaucoup du manoir mais il y a aussi le colombier, deux moulins, les crèches, la grange, le parc, le bois... C'est une feuille vierge, où on peut écrire quelque chose et où on peut créer quelque chose à l'avenir."

Jonathan
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Crédit : Yann Launay

Aujourd'hui, Jonathan, menuisier de profession, consacre une grande partie de son temps libre au sauvetage du manoir. Il accueille et guide les visiteurs chaque premier dimanche du mois. De cette aventure, il en a même tiré un livre, richement illustré. Edité en série très limitée, "Le Manoir de la Boissière, sauvetage et renaissance" sera disponible dans les médiathèques du sud-Finistère.

Le 9 avril prochain sera organisée une chasse aux œufs dans le parc du château, ainsi qu'une balade contée.