Pornichet. Les larmes de sirène ramassées sur les plages de l'Atlantique par Marion Lescaut
Publié : 18 avril 2024 à 10h12 - Modifié : 18 avril 2024 à 10h15 par Dolorès CHARLES
Rencontre hier (mercredi 17 avril) avec Marion Lescaut qui longe la côte Atlantique pour ramasser les "larmes de sirène", ces granulés de plastique industriels (GPI), qui pullulent sur les plages. Les GPI sont à l’origine de la production plastique, et pourtant, 98% des gens ignorent de quoi il s’agit.
Elle traque les granulés de plastique sur les plages de France et d'Espagne : Marion Lescaut est de passage sur la côte bretonne, avec son tamis. Elle effectue un périple de 3 000 kms le long de la côte Atlantique, pour sensibiliser à la présence de ce que l'on surnomme les "larmes de sirène". Avec comme objectif d'informer le public et les élus sur cette pollution, et de démontrer que ces petites billes sont beaucoup plus nombreuses dans l'environnement, qu'on pourrait le penser.
Ces granulés de plastiques vont mettre "d'une centaine à plusieurs centaines d'années à se dégrader"
Sur la plage de Pornichet, en Loire-Atlantique, le sable semble propre, mais quand on le passe au tamis, c'est une autre histoire : "il y en a au moins une dizaine, c'est vraiment tout petit, ça fait entre 2,8 et 3,2 mm en moyenne, donc j'utilise un tamis très fin. De toute façon, à partir du moment où il y a des transports maritimes, ça se perd en mer. Ces accidents maritimes arrivent souvent, mais on n'en parle pas, et ces granulés de plastique servent à toutes les usines de plasturgie, parce que cela produit tous vos objets en plastique. C'est petit et hyper nuisible : non seulement il y a une pollution terrestre, mais il y a surtout une pollution marine." Ces granulés de plastiques vont mettre "d'une centaine d'années à plusieurs centaines d'années à se dégrader selon le type de plastique."
Marion veut réaliser des œuvres d'art avec les granulés ramassés
Marion s'était fait connaître pour ses vêtements fabriqués avec des masques anti-covid usagés. Cette fois, elle veut réaliser des œuvres d'art avec les granulés qu'elle aura ramassés. Marion n'a évidemment pas l'ambition de nettoyer à elle seule toute la façade atlantique : son action reste symbolique... mais elle est aussi un peu thérapeutique, pour celle qui a quitté son emploi de clerc de notaire pour nettoyer la nature. "L'action permet de lutter contre les anxiétés, et cela me rend heureuse de faire ça... C'est un sentiment de satisfaction assez important de voir un endroit sale au départ et de le laisser beaucoup plus propre. J'ai bien conscience que vu la taille des plages en général, c'est impossible pour moi de faire toute la plage. Le but de cette action est vraiment de montrer qu'il y en a partout, sur toutes les plages. C'est une pollution peu ou pas connue... Seuls les personnes concernées et les ramasseurs de déchets connaissent "les larmes de sirène."
Ces "GPI" - granulés de plastique industriel - sont transportés par bateaux, dans le monde entier, pour servir à la fabrication d'objets en plastique. Régulièrement, des conteneurs remplis de GPI tombent à la mer, et pour Marion, il faut inciter les transporteurs à davantage de précautions : il faut "les responsabiliser davantage. Un accident maritime cela arrive, mais cela arrive beaucoup trop souvent ! S'il n'y a pas de sanction ou de mise en responsabilité, on fait ce qu'on veut. Le 22 avril au Parlement européen, il y aura des amendements, qui devraient être votés et être mis sur la table pour que la santion soit plus efficace... Il y a peut être des solutions qui permettraient que cela n'arrive plus."
Le périple de Marion vise aussi, plus largement, à alerter sur la consommation de produits en plastique, sur laquelle chacun peut agir. "Le plastique est en pleine expansion, sa production a doublé, triplé et va continuer d'augmenter... Sans vouloir culpabiliser les consommateurs, s'ils changent leur façon de consommer " en demandant moins de plastique et moins d'emballages, " les industriels s'adapteraient." Selon la Commission européenne, près de 184 000 tonnes de granulés plastique se retrouveraient chaque année dans l'environnement, pour le seul territoire européen.
Marion sera ce jeudi (18 avril) du côté de Pornic, avant de mettre le cap sur La Rochelle, et elle devrait atteindre la Galice au mois de mai. Une cagnotte leetchi est en ligne pour soutenir sa démarche.