Emissions de CO2 : "un objectif ambitieux et indispensable", pour la brestoise Anne-Marie Tréguier
Publié : 22 mai 2023 à 21h36 - Modifié : 8 juin 2023 à 12h35 par Dolorès CHARLES
"La moitié de l’effort sera accompli par les entreprises" : Elisabeth Borne a dévoilé ce lundi (22 mai) la vision du gouvernement pour réduire de 50% les émissions de gaz à effet de serre, d'ici 2030. Le plan prévoit notamment de passer de 1% de voitures électriques dans le parc automobile français à 15% d’ici sept ans. Les explications d'Anne-Marie Tréguier, océanographe à l'IUEM de Brest (29).
"Réduire de 50% les émissions de gaz à effet de serre en 2030 en France, par rapport à 1990" : c'est l'objectif du plan présenté ce lundi 22 mai par Elisabeth Borne. Pour tenir ce chiffre, la cheffe du Gouvernement veut accélérer sur la décarbonation du transport, la décarbonation des sites industriels, mais aussi faire disparaître les chaudières au fioul ou à gaz. Chacun devra participer à son niveau, mais environ la moitié des efforts sera porté par les entreprises.
"Il y a urgence à agir, mais je suis plutôt optimiste sur le fait qu'on réussisse à stabiliser la courbe, ce qui suppose que tous les habitants de chaque pays et que tous les pays prennent les choses en main"
Un objectif ambitieux et indispensable, pour Anne-Marie Tréguier, océanographe à l'IUEM de Brest (*) et co-autrice du GIEC, mais pour la coprésidente du Haut conseil breton pour le climat, encore faut-il que l'application concrète soit à la hauteur de l'ambition : "suite à l'accord de Paris, des engagements avaient été pris par la France, qui n'ont pas conduit à la baisse des émissions espérée. Il y a une incertitude, qui peut rendre peut-être un peu sinon pessimistes, du moins inquiets! Il faut espérer que l'efficacité soit meilleure dans les nouvelles politiques qui vont être mises en œuvre. Il y a urgence à agir, mais je suis plutôt optimiste sur le fait qu'on va réussir à stabiliser la courbe, ce qui suppose que tous les habitants de chaque pays et que tous les pays prennent les choses en main."
(*) Institut universitaire européen de la mer, section de l'UBO (Université de Bretagne Occidentale)
La France veut faire mieux, et plus vite...
Mais cela a-t-il un sens si dans grande partie du monde les émissions augmentent ? Assurément oui, pour Anne-Marie Tréguier interrogé par Yann Launay. "La France elle-même ne pèse pas beaucoup, mais la France est en Europe, et il s'agit d'un engagement européen : l'Europe est le quatrième émetteur dans le monde, donc si en tant que quatrième émetteur dans le monde, l'Europe ne se mobilise pas, ce serait un signal politique envoyé qui serait catastrophique. D'une part, l'engagement de la France est important parce qu'il est en contexte européen et l'engagement de l'Europe est important parce qu'il est nécessaire pour que les choses bougent et s'améliorent."
Un refroidissement est-il possible ?
Le respect des Accords de Paris, la limitation du réchauffement global à moins de 2°, reste encore possible. Mais si l'Europe et les plus gros pays émetteurs atteignaient la neutralité carbone dans 10 ou 15 ans, le climat se stabiliserait-il immédiatement, et un refroidissement est-il possible ? "En 2060, avance Anne-Maris Tréguier, si on arrive à zéro émission eh bien en dix ou vingt ans, on verra se stabiliser la concentration en CO2 de l'atmosphère, on verra se stabiliser les températures ...Mais les événements extrêmes, les sécheresses, etc. vont rester au niveau où ils seront en 2060. On ne va pas revenir en arrière parce que pour revenir en arrière, tout le CO2 qu'on émet tous les jours, et dont 40 % restent en l'air, il faudrait qu'on l'enlève et on ne sait pas le faire à une échelle planétaire et de l'atmosphère."
Le réchauffement climatique menace l'océan
Ce plan est présenté à la veille des Journées Européenne de la Mer, qui se dérouleront ce mercredi et jeudi à Brest. Les préoccupations environnementales seront au cœur des débats. Le réchauffement climatique menace l'océan, mais l'océan peut aussi être un allié dans la lutte contre le réchauffement climatique. Comment ?
"Avec les énergies marines renouvelables, les hydroliennes, les éoliennes en mer font partie du portefeuille d'Énergies Renouvelables que l'on doit déployer. Il y a aussi toutes les solutions fondées sur la nature, qui doivent nous aider peut-être à capturer du carbone dans une certaine mesure, mais ce n'est pas ça qui va nous sauver. Il faut d'abord qu'on arrête d'émettre, mais ça peut quand même, de façon un peu marginale, aider à capturer du carbone... et puis cela peut aider à atténuer les impacts. On sait que l'érosion côtière peut être atténuée si on préserve la nature, si on préserve des mangroves, par exemple sur les littoraux. Cela peut permettre d'atténuer les impacts négatifs de l'élévation du niveau de la mer."
Les mesures détaillées du plan de réduction des gaz à effet de serre sera présenté à la fin juin.
Les Journées Européennes de la Mer se dérouleront ce mercredi (24 mai) et jeudi (25 mai), au Parc des expositions de Brest. Le Haut conseil breton pour le climat organise un tout premier forum "Climat & Territoires" le 2 juin, à Lorient dans le Morbihan. Le forum portera sur l'adaptation au changement climatique. Il sera ouvert au grand public et se tiendra à l'Université de Bretagne sud.