Des champignons bios et bretons, produits dans le Finistère

Publié : 26 octobre 2021 à 6h45 par Dolorès CHARLES

Jefferson et Xavier, producteurs de champignons bios
Crédit : Yann Launay

En pleine saison de cueillette des champignons en forêt, focus sur des champignons bios et bretons, produits à Ploudiry.

Les champignons restent méconnus, alors qu'ils peuvent être une clé pour la transition écologique : c'est le credo de Jefferson et Xavier, producteurs de champignons bio à Ploudiry, dans le Finistère, et lauréats de l'"Accélérateur Initiatives Jeunes" de la Région Bretagne et de la plateforme Kengo. Techniciens aéronautique de formation, Jefferson et Xavier se sont connus sur la base de Lanvéoc-Poulmic, mais ils ont choisi de changer de voie et de créer "Breizh Bell". Leur jeune entreprise fournit déjà en shiitakés, pleurotes et pholiotes des tables gastronomiques, comme "L'Embrun", de Guillaume Pape, finaliste Top Chef 2019.

L'objectif de Jefferson et Xavier n'est pas d'inonder le marcher avec leurs champignons frais ou séchés : ils recherchent la qualité et l'innovation, dans une démarche écoresponsable.  Leur vaste hangar abrite des serres et des tentes où poussent les différentes espèces de champignons. L'ensemble a des allures de repaire de Géo Trouvetou : Jefferson et Xavier ont fabriqué eux-mêmes la plus grande partie de leur installation, souvent à partir de matériaux de récupération. Mais recyclage, récupération, ne rime pas avec approximation :

"Chaque serre a une température, une humidité, un taux d'oxygénation et un taux de lumière précis. Pour la culture du shiitaké, on est à peu près à 20°, pour 95% d'humidité, avec rajout en oxygène à l'intérieur pour descendre le taux de CO2 pour la fructification, et en lumière on est à 2 000 lumens (...) En fait, il faut recréer l'écosystème dans lequel ils doivent pousser : ça nous demande de la vapeur pour les shiitakés, et une éclaboussure pour les pleurotes."

Xavier producteur
Crédit : Yann Launay

Une banque de champignons

Xavier et Jefferson ne comptent pas se cantonner à la culture de champignons alimentaires, leur objectif est plutôt de devenir une banque de champignons, et un centre de tests, d'expérimentations, pour valider l'utilisation de champignons en lieu et place de fabrications industrielles polluantes :

"Le champignon était là bien avant nous, on peut tout traiter, rien de secret, rien ne se perd et tout se transforme. On peut vraiment tout refaire avec les champignons... Par exemple, il y a un champignon qui va digérer le plastique, donc on peut faire des composteurs de plastique. La peau, par exemple, du chapeau du shiitaké, se défait très bien, et on peut en faire du cuir végétal de champignon... Les possibilités sont illimitées. Tout ce qu'on peut faire avec le champignon, on va essayer de le faire."

Champignons bios bretons
Crédit : Yann Launay
Breizh Bell Laboratoire
Crédit : Yann Launay
Xavier producteur
Crédit : Yann Launay

Le champignon, un atout pour la nature de demain 

Le duo travaille à un projet ambitieux : utiliser des champignons pour la régénération des sols pollués, comme l'explique Jefferson : "on se rend compte que le gros problème, c'est que le taux de nitrates et de phosphates, qu'on utilise en agriculture conventionnelle, atteint 10 à 20 fois le taux acceptable pour que la vie dans le sol puisse se développer... On va vouloir travailler avec les agriculteurs conventionnels, pour que leur transition se fasse en 2 ans au lieu de 5 ans : c'est d'abord dépolluer le sol avec des plantes, puis injecter nos micro-organismes et nos champignons."

 

Jefferson, producteur de Breizh Bell
Crédit : Yann Launay

"On est en circuit fermé"

La culture des champignons est gourmande en énergie, puisqu'il faut maîtriser la température, le taux d'humidité, et la lumière. Par souci de cohérence, Jefferson et Xavier visent l'autosuffisance, que ce soit pour le chauffage, l'électricité ou l'eau utilisée. Pour l'eau, c'est déjà une réalité : ils utilisent l'eau de pluie qui tombe sur le vaste toit du hangar :

"Tout est fait avec l'eau de pluie, on est en circuit fermé... Les panneaux solaires thermiques vont bientôt être installés, donc on sera bientôt autosuffisants en chauffage. Pour le gaz, on va faire la petite centrale de méthanisation l'année prochaine, il faut encore qu'on puisse voir si on peut l'implanter. Par contre, pour l'électricité, on est déjà en relation avec l'organisme qui va nous montrer comment les construire : des éoliennes de type Piggott, avec un rotor d'un diamètre de 3 mètres. On va en fabriquer 4 ou 5 pour être autosuffisants en électricité."

Xavier de Breizh Bell
Crédit : Yann Launay