Bretagne. Les stations de lavage sortent la tête de l'eau

Publié : 13 octobre 2022 à 8h14 - Modifié : 13 octobre 2022 à 12h12 par Dolorès CHARLES

Station-lavage Ploneour Lanvern
Crédit : Yann Launay

Fermées dans plusieurs départements de l'ouest pour cause de sécheresse, les stations de lavage sortent peu à peu la tête de l'eau, avec une réouverture partielle autorisée dans le Finistère et le Morbihan. Reportage aux côtés des gérants et des gérants de stations.

Les stations de lavage du Finistère et du Morbihan ont pu rouvrir, partiellement, sur décision des préfets. Une réouverture qui peut surprendre, alors que ces départements sont toujours en "crise sécheresse". Fermés depuis deux mois, les propriétaires de stations de lavages demandaient cette réouverture, alors que leur situation économique devenait compliquée, en l'absence de compensation financière. Et pour Pierre Nelias, qui gère deux stations de lavage dans le Finistère, la fermeture a été plutôt une opération de communication des autorités qu'une réelle mesure d'économie d'eau, d'autant que l'une de ses stations est équipée d'un système de recyclage de l'eau :

"On est très visibles, et le fait de fermer cela fait prendre conscience aux gens qu'il y avait un réel problème sur l'eau. On a servi de support publicitaire aux autorités, par contre, la solution de nous fermer, je ne suis pas sûr que cela ait vraiment impacté l'économie d'eau, mais je pense que cela a eu un impact sur la population le premier mois. Ensuite, les gens ont rapidement recommencé à laver chez eux. Ici, on est comme notre région plutôt rurale où les gens ont des jardins, ils ont commencé à laver chez eux leur véhicule, consommant cinq fois plus d'eau que dans une station de lavage ! et surtout aussi une pollution parce qu'on pollue aussi bien les nappes phréatiques que les réseaux d'eaux pluviales, parce que l'eau n'est pas retraitée."

Pierre Nelias
Crédit : Yann Launay

"Une voiture sale est une voiture qui pollue"

La réouverture est partielle, et seuls les programmes les plus simples sont autorisés sur les portiques. Un professionnel comme Pierre Nélias demande lui-même aux clients d'espacer les passages à la station de lavage. En soulignant tout de même l'intérêt de laver les voitures régulièrement.

"Sur les parkings maintenant de grandes surfaces ou même sur les gros ronds points, on met des séparateurs d'hydrocarbures. Ce n'est pas anodin, c'est parce que juste la pluie, quand elle ruisselle sur un véhicule, elle lave effectivement un peu le véhicule, mais elle se charge en hydrocarbures et toute cette eau retourne dans le réseau d'eaux pluviales et pollue les sols. Il faut savoir qu'on vide nos fosses et séparateurs d'hydrocarbures à peu près trois fois par an : à chaque vidange, c'est dix tonnes de boue qui sont récoltées et qui sont ensuite envoyées en filiale de traitement pour être recyclées."

 

Pierre Nélias et Philippe Rannou
Crédit : Yann Launay
Réouverture de la station de lavage
Crédit : Yann Launay
Pierre Nélias
Crédit : Yann Launay

"C'est plus agréable d'avoir un véhicule propre !"

Avec cette réouverture, les clients sont de retour. Ils n'ignorent pas la situation de crise sécheresse, qui se poursuit, alors pourquoi est-ce si important de laver leur voiture ? Quelques réponses recueillies dans une station de lavage du Finistère par Yann Launay : "cela fait plus de deux mois avec les restrictions qu'on a eues, cela commençait à être un peu urgenc. On peut s'en passer mais c'est quand même plus agréable d'avoir un véhicule propre. Je ne dis pas toutes les semaines, mais au moins une fois tous les deux mois, c'est bien... J'ai fait le minimum, j'ai lavé la voiture, elle n'est pas cirée, elle n'est pas relativement propre. Je ne me sens pas coupable, je ne lave pas ma voiture tous les quinze jours. Si elle est lavée une fois tous les trois mois, il faut quand même vivre !"

Les automobilistes
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Crédit : Yann Launay

L'eau de lavage recyclée, et préservée à 80%

Les gérants de stations de lavage demandaient la réouverture pour ne pas mettre la clé sous la porte, mais aussi parce que certains sont désormais équipés de systèmes de recyclage de l'eau de lavage... comme le système développé par la société bretonne Hydro'environnement, basée près de Quimper, et dirigée par Philippe Rannou : "cette eau polluée passe dans une cuve dans lequel il y a une décantation, une séparation, un digesteur biologique avec des petites bébêtes qui mangent les polluants et ensuite on affine avec différentes filtrations - phase de filtration - avant une phase de désinfection pour qu'il puisse y avoir une réutilisation de cette eau en bonne et due forme dans le matériel de lavage. On va collecter d'abord 100 % de l'eau sur l'ensemble du matériel de lavage de la station et ensuite on va recycler 80 % de cette eau puisqu'on estime qu'il y a 20%de cette eau qui part en déperdition soit par aérosol, par évaporation et qui reste également sur la voiture. 80 % de l'eau est ainsi préservée."

 

Philippe Rannou
Crédit : Yann Launay

Un soutien des autorités attendu

Certaines stations s'équipent de systèmes de recyclage de l'eau, et ne comprennent pas de devoir fermer de la même façon que les stations non équipées. Philippe Rannou, comme les gérants des stations équipées, attend un soutien des autorités, une législation claire, et avant tout la garantie pour les gérants de pouvoir rester ouverts même en cas de sécheresse :

"Les professionnels du lavage, qui prennent conscience de l'état de situation parce que c'est une conscience collective, à partir du moment où ces personnes sont équipées de systèmes de traitement et recyclage des eaux de lavage, et qu'il économisent 80 % de cette eau, c'est 80 % de cette eau retirée en moins au niveau du réseau public, ils doivent absolument avoir le droit de continuer à travailler. Nous attendons des réponses des pouvoirs publics. Il va falloir en parler pour les eaux de lavage, mais aussi pour lrs blanchisseries ou la récupération des eaux de toiture."

A leur tour, les gérants de stations de lavage d'Ille-et-Vilaine demandent eux aussi la possibilité de rouvrir, au moins partiellement, comme leurs confrères du Finistère, du Morbihan ou de Loire-Atlantique. Dans les Côtes-d'Armor, le département est en "vigilance renforcée" les stations de lavage ne sont plus concernées par la mesure de fermeture.