Agressions sexuelles : L’évêque de Nantes dit sa honte

Publié : 6 octobre 2021 à 0h03 - Modifié : 6 octobre 2021 à 0h06 par Emilie PLANTARD

Monseigneur Laurent Percerou, évêque de Nantes et Jean-Luc Pilet
Crédit : Emilie Plantard

La Commission Indépendantes sur les Abus Sexuels dans l’Eglise a rendu son rapport ce mardi 5 octobre et cette date marquera un tournant dans l’histoire de l’institution. A Nantes, l’évêque a tenu à dire sa honte et sa tristesse face à toutes ces victimes.

Elle travaille sur le sujet depuis 2019, la Commission Indépendantes sur les Abus Sexuels dans l’Eglise, présidée par Jean-Marc Sauvé, a rendu un rapport (485 pages, 2500 annexes), où sont écrits noir sur blanc les crimes commis sur de de très nombreuses victimes : Entre 216.000 et 330.000 mineurs. Une révélation fracassante, blessante pour toute une communauté, à commencer par les institutionnels. L’évêque de Nantes, Monseigneur Laurent Percerou, a tenu une conférence de presse ce mardi après-midi pour communiquer sur la position des évêques de France. Il a d’abord avoué sa peine, face aux horreurs dévoilées dans le rapport :

Monseigneur Laurent Percerou, évêque de Nantes
Crédit : Emilie Plantard

"Je voudrais pour commencer exprimer devant vous, ma honte, ma très grande honte, devant ce que nous avons entendu ce matin, parce que ça dépasse de loin ce que nous attendions. Honte, effroi, beaucoup de tristesse… Et mes premières pensées vont d’abord aux très nombreuses victimes, je crois que nous entendons leurs voix, leurs cris. Je suppose que pour eux, c’est une journée très douloureuse même si les victimes, sans doute aussi, arrivent au bout d’un long chemin de reconnaissance."

Un séisme pour les catholiques de France

La remise de ce rapport résonne comme une déflagration au sein de l’église catholique de France. Il était espéré par les victimes mais elle affecte toute une communauté, qui aujourd’hui, va devoir se relever de ce scandale ; L’évêque de Nantes le reconnaît.

Monseigneur Laurent Percerou, évêque de Nantes
Crédit : Emilie Plantard

"C’est comme une immense catharsis qu’on est en train de vivre. Pour ce qui est de ce dossier dans l’église de France, on est à un moment historique. Il y a eu un avant, il y aura un après. Et je crois que c’est le moment de se dire comment retisser la confiance. Ca va prendre du temps, il faut qu’on accepte dans les semaines qui viennent, dans les mois qui viennent, peut-être de perdre des gamins au cathé, de perdre des jeunes dans nos mouvements et aumôneries… Mais ça il faut qu’on l’accepte. A nous de voir comment on s’engage sur un chemin de purification, pour redonner confiance. Et ça, ça passe par les mesures qu’on va prendre et aussi de ce que nous allons proposer à vivre. Et par la qualité de ce que nous allons vivre."

Une cellule d'écoute dans la région

La région Pays-de-la-Loire n’est pas épargnée, beaucoup ont en tête le scandale du petit séminaire de Chavagnes-en-Paillers qui a fait des dizaines de victimes dans les années 50/60. L’évêque de Luçon a d’ailleurs été le premier à faire acte de repentance en octobre 2020, pour toutes les déviances commises dans son diocèse par des prêtres pédophiles.

En 2016, l’évêque de Nantes a souhaité, lui, créer une cellule d’accueil et d’écoute des victimes, rapidement étendue aux pays de la Loire. Composée de 6 professionnels de santé ou du secteur juridique, elle a pour vocation de recueillir la parole de victimes d’agressions sexuelles au sein de l’église, et de les accompagner. L’équipe a recensé 71 victimes à ce jour, ainsi que 56 agresseurs, dont 80% sont des prêtres, aujourd’hui pour la plupart décédés.

Jean-Luc Pilet est le responsable de la cellule et par ailleurs psychologue, il a accompagné l’évêque de Nantes lors de son point presse, pour évoquer les victimes recensées dans la région.

Monseigneur Laurent Percerou, évêque de Nantes
Crédit : Emilie Plantard

"Depuis la mise en place de la cellule régionale, il y a 5 ans, 71 personnes nous ont contactés. Et les 2/3 des appels ont eu lieu ces 2 dernières années. Ils sont âgés dans leur plus grande majorité, de plus de 60 ans. Par contre, 80% avaient moins de 18 ans au moment de leurs agressions. Et quelle que soit la gravité des faits relatés, l’immense majorité des victimes présente actuellement des séquelles traumatiques. Certaines souffrent même de troubles chroniques envahissants. Plus de 40 ans après, ils sont aussi malades qu’au premier jour."

Une réparation indispensable

La conférence des évêques de France reconnaît ne pas avoir écouté suffisamment les victimes. Aujourd’hui, elle leur demande pardon mais cela passera certainement par un geste de réparation. Les évêques travaillent sur la question, notamment financièrement.

Monseigneur Laurent Percerou, évêque de Nantes
Crédit : Emilie Plantard

"Aujourd’hui, on s’oriente plutôt sur une aide à la recontruction des victimes. Ça peut être, entre autres, une aide psychologique. Et donc, voir avec elles comment, financièrement, nous pouvons participer à leur recontruction. Donc il ne s’agirait pas du même forfait pour tout le monde, mais de dire pour telle personne, qui est dans le besoin, qui n’a pas trop de moyens, comment l’église prend en charge, participe à ce soin. Et donc il va y avoir un fond dédié, il y a déjà l’idée de pouvoir avoir une première base de 5 millions d’euros, et de regarder ensuite comment on va travailler pour abonder ce fond, pour aider à la reconstruction des victimes."

 

Les évêques réfléchissent à demander aux fidèles qui sont d’accord, de contribuer à ce fond.

Pour en savoir plus...

Il est possible de lire le rapport sur le site dédié www.ciase.fr

Pour contacter la cellule des Pays-de-la-Loire, une adresse mail : paroledevictimespaysdeloire@gmail.com

Un carnet existe aussi, sur internet https://luttercontrelapedophilie.catholique.fr