A Nantes, les greffiers dénoncent le mépris envers leur profession

Publié : 26 juin 2023 à 23h21 - Modifié : 27 juin 2023 à 11h53 par Emilie PLANTARD

Les greffiers mobilisés à Nantes
Les greffiers mobilisés à Nantes
Crédit : Emilie Plantard

Ce lundi 26 juin, une trentaine de greffiers s’est mobilisée pour dénoncer le mépris du ministère de la justice envers leur profession. Malgré une réforme prévue à la rentrée qui prévoit une revalorisation salariale, jugée bien faible.

Les greffiers sont en colère, et ils l’ont exprimé ce lundi 26 juin devant les palais de justice. A Nantes, à Saint-Brieuc, à Rennes, à Brest... Plusieurs centaines de ces "petites mains" de la justice, comme ils se surnomment, sont sortis de leur réserve pour dénoncer le mépris dont fait preuve le ministère à leur égard. Une réforme est pourtant en projet pour refonder les grilles d’indices et revaloriser les salaires.

La réforme de la grille indiciaire est vraiment indécente

Devant le tribunal de Nantes, ils sont plusieurs dizaines à avoir enfilé la robe et sorti les pancartes, pour redire aussi leur ras-le-bol face à des conditions de travail qui ne s’améliorent pas. "C’est important de montrer notre mobilisation, de montrer notre mal-être, les conditions dans lesquelles on travaille qui sont plus qu’inacceptables, justifie Mélanie Ramon, greffière du juge d’application des peines. La réforme de la grille indiciaire qu’on nous a proposé est vraiment indécente. Effectivement, il y a un petit effort qui est fait mais au prix de combien d’années de non-effort ? Il est vraiment petit par rapport à ce qu’on vit, par rapport à nos compétences, il y a les greffiers, mais aussi les personnels de greffe adjoints, qui font des tâches de greffier, des tâches d’exécution mais qui sont nécessaires... On est vraiment les petites mains de la justice mais il faudrait qu’on soit des petites mains considérées."

Mélanie Ramon, greffière du juge d’application des peines à Nantes
Crédit : Emilie Plantard

"Le tribunal est en souffrance"

C’est une goutte d’eau pour le délégué CFDT du greffe de Nantes, Aurélien Parès. A Nantes, l’augmentation de 5 % de l’effectif du greffe décidée en 2022 n’avait pas suffi non plus à améliorer leurs conditions de travail. "Cette réforme statutaire c’est histoire de dire qu’on a proposé quelque chose, arrêtez de vous plaindre, regrette t-il. Mais on ne se plaint pas qu’ils nous proposent quelque chose, on se plaint car ils nous proposent quelque chose de totalement irrespectueux par rapport à la réalité de ce qu’on vit au quotidien. A Nantes, ça fait des mois qu’il y a une contestation, que le tribunal est en souffrance pour manque de moyens, et aujourd’hui on a des arrivées mais il y a autant de départs ! 14 demandes de détachements dans une seule juridiction c’est quand même un signe fort du ras-le-bol de l’ensemble des collègues et c’est aussi ce qu’on veut faire entendre."

Aurélien Parès, greffier et délégué CFDT au tribunal de Nantes
Crédit : Emilie Plantard

Un rôle (de greffier) indispensable au fonctionnement du tribunal

A Nantes, ces professionnels de la justice, sous l’eau, sont indispensables au bon fonctionnement de la machine judiciaire, mais ils n’ont pas la même reconnaissance que les magistrats. Le greffier est là du début à la fin, explique Aurélien Parès, délégué CFDT, c’est-à-dire qu’il va d’abord être la porte d’entrée de la procédure : il va avoir pour rôle de l’enregistrer, de lui donner sa place dans la chaîne judiciaire. Une fois que cette procédure est enregistrée, il va avoir un rôle de convocation. Sans ce travail, le magistrat n’a pas lieu d’intervenir et au-delà de toute cette part de convocation, de prise de notes à l’audience, et de notification a postériori de l’audience, il y a la possibilité de recours. Il va prendre acte d’un recours d’une des parties pour contester une décision rendue."

Aurélien Parès, greffier et délégué CFDT au tribunal de Nantes
Crédit : Emilie Plantard

"Même pas 15 euros brut"

Cette refonte va modifier l’ancienneté et l’augmentation du point d’indice est plutôt faible. Cela valorise donc peu cette profession, dont les conditions de travail se sont considérablement dégradées ces dernières années. "Il faut donner envie aux gens de venir dans nos juridictions et ce n’est pas en faisant des pseudo-réformes, déplore Aurélien Parès... Pour être très concret, moi il me semble que je vais gagner 3 points en changeant de grille, je vais perdre 2 échelons et gagner 3 points d’indice. A 4,92 euros le point donc vous faites le calcul, ça ne fait même pas 15 euros brut, c’est ridicule, c’est du mépris, on ne demande pas 1 000 euros de prime comme il a été donné aux magistrats, on ne fait pas le même métier, mais une vraie reconnaissance."

 

Aurélien Parès, greffier et délégué CFDT au tribunal de Nantes
Crédit : Emilie Plantard

 A Nantes comme ailleurs, des magistrats et des avocats se sont joint au mouvement des greffiers.