Tempêtes : L'érosion côtière renforcée sur notre littoral
Publié : 13 novembre 2023 à 10h29 par Dolorès CHARLES
Crédit : Yann Launay
Céline, Ciaran, Domingos … Les tempêtes récentes ont renforcé l’érosion côtière sur notre littoral, et avec la hausse du niveau de la mer, celles à venir pourraient être de plus en plus destructrices. Reportage dans le Finistère, aux côtés de la présidente du Comité du trait de côte.
Les tempêtes à répétition renforcent l’érosion côtière et avec la hausse du niveau de la mer liée au réchauffement climatique, les tempêtes à venir pourraient être de plus en plus destructrices. Les collectivités de l'ouest tentent de s'adapter, épaulées par le "Comité national du trait de Côte". Céline, Ciaran, Domingos : 3 tempêtes en huit jours qui ont laissé des traces sur le littoral, comme par exemple à Penmarc'h, sur la côte sud du Finistère, comme l'explique son maire, Gwénola Le Troadec :
"C'est la première tempête sur le cordon dunaire qui a été la plus forte avec des coefficients de 104. On a vu des endroits qui se sont enfoncés de 4m C'est dû au fait que les vents changent. A Penmarc'h, on a trois orientation Nord Ouest, Ouest et Sud, et avant c'était de bonnes vieilles tempêtes Nord Nord-Ouest avec une plage visée, etc Aujourd'hui, les tempêtes viennent de manière précoce. On en a même l'été et elles viennent toujours du Sud - Sud -Ouest. On va perdre la bataille, c'est la mer qui va gagner, donc ce qu'on va faire c'est protéger ce qu'on peut protéger et laisser de l'espace à la mer..."
"On ne va pas attendre la submersion et la catastrophe, il faut anticiper"
Inviter les habitants à quitter leur maison située en zone submersible : Gwénola Le Troadec s'y prépare, en mesurant la complexité de cette démarche : "on fait partie d'une zone littorale où la population est vieillissante (...) On va aller voir ces personnes, créer des réunions publiques, et prendre des décisions ensemble. Franchement, c'est un enjeu formidable (...) on va trouver un autre terrain et construire une maison peut être avec plusieurs personnes. C'est un changement de modèle. On ne va pas attendre la submersion et la catastrophe, il faut anticiper."
Titre :Gwénola Le Troadec
Crédit :Yann Launay
La menace se précise pour les habitations
localement, pour les habitations désormais en zone inondable. Dans certains cas, ils seront invités à quitter leur maison. Des centaines de logements sont concernés en France pour les toutes prochaines années. La présidente du Comité du trait de côte était en Bretagne, ces derniers jours. La député de Gironde Sophie Panonacle a échangé avec les élus et constaté sur le terrain les effets de l'érosion.
La réflexion est en cours, pour trouver des solutions aux habitants menacés par la mer, dans la concertation : "il n'y aura pas d'expulsion, la personne pourra rester dans sa maison aussi longtemps qu'elle le souhaite à partir du moment où il n'y a pas de danger, et à partir du moment où il y aura un péril évidemment, un arrêté de péril sera pris et la personne devra partir. Après, il peut y avoir une négociation amiable parce qu'on pourrait expliquer aux particuliers que d'ici 5 ans, 10 ans, 30 ans, 40 ans, leur maison finira dans l'eau. Est ce qu'ils continuent à en user ? et ces personnes deviendraient "des locataires" de leur maison et les collectivités en seraient les propriétaires. C'est une possibilité. Après, il y a des gens qui vont souhaiter quitter le bien et la mairie va les accompagner à trouver un autre terrain pour reconstruire autre chose avec un accompagnement financier."
Crédit : Yann Launay
Titre :Sophie Panonacle
Crédit :Yann Launay
"Il ne s'agit pas de faire peur, il s'agit juste de faire prendre conscience à la population de ce qui arrive et que collectivement, on prenne les bonnes mesures"
Les enrochements, les épis et les digues ont montré leurs limites, et par endroit ces ouvrages aggravent l'érosion. Le Comité du trait de côte ne défend pas l'idée de construire des digues, des protections géantes en béton, comme au Japon. Pour Sophie Panonacle, ce n'est pas une solution : "les ouvrages de protection sont encore utiles parce que relocalisés, se replier pour des collectivités ça va prendre de nombreuses années... et en attendant, il faut quand même protéger. On ne peut pas mettre les populations en danger, il faut soit consolider des ouvrages, soit en construire de nouveaux quand ce sera utile, ce ne seront que des ouvrages temporaires. Après, il faudra laisser rentrer la mer, on devra renaturer les espaces... Il ne s'agit pas de faire peur, il s'agit juste de faire prendre conscience à la population de ce qui arrive et que collectivement, on prenne les bonnes mesures."
Titre :Sophie Panonacle
Crédit :Yann Launay
Un collège démoli à Guissény
Eriger des murs géants contre les flots paraît déraisonnable, et la bataille semble perdue d'avance. Pour le Comité national du trait de côte, il va falloir apprendre dans certaines zones à se replier, à laisser la mer avancer.
A Guissény, sur la côte Nord Finistère, la municipalité s'y prépare déjà. Un ancien collège de la commune, construit au fond d'une crique, doit être détruit, et le terrain rendu à la nature, comme l'explique Raphaël Rapin, maire de Guissény : "il y a déjà une partie qui, à un moment donné, serait forcément redevenue de la mer sur le premier bâtiment et derrière reconstruire de l'habitat en ayant conscience qu'à un moment donné, il y a ce risque que ça devienne du terrain inondable ne nous paraît pas pertinent. L'idée est de le restituer à la nature, c'est à dire de démolir les bâtiments qui sont dessus, rendre ça au plus proche d'un habitat de l'estran, avec une végétation adaptée. On renature quasiment un hectare, et on récupère 1 ha en proximité du bourg et en continuité du bourg pour développer de l'urbanisation en sécurité."
Titre :Raphaël Rapin, maire de Guissény
Crédit :Yann Launay
Le Comité national du trait de côte doit remettre d’ici la fin de l’année ses propositions pour organiser et financer les adaptations. Des financements spécifiques devraient être opérationnels en 2025.
A ce jour, 101 communes de Bretagne et des Pays de la Loire ont demandé leur classement en territoire vulnérable soumis à l'érosion côtière. Elles sont 242 à l'échelle de la France entière. La liste doit être mise à jour dans les semaines qui viennent.