Projet de loi Immigration : le Secours catholique veut voir le texte enterré, mais il est renvoyé en commission

Publié : 12 décembre 2023 à 11h57 - Modifié : 12 décembre 2023 à 12h01 par Dolorès CHARLES

Assemblée Nationale

Crédit : Assemblée Nationale

C'est un échec pour le gouvernement et son ministre de l'Intérieur, Gérard Darmanin, l'adoption hier (lundi 11 décembre) de la motion rejetant l'examen du projet de loi Immigration par les députés. Le texte va partir en commission mixte paritaire pour que 7 députés et 7 sénateurs cherchent un accord. En attendant les associations comme le Secours Catholique auraient, elles, aimé voir adopté l'article sur la régularisation dans les métiers en tension.

Le projet de loi immigration rejeté par les députés, avant même son examen : la motion de rejet a été votée par 270 voix contre 265. Le gouvernement peut maintenant retirer son texte, réunir une commission mixte paritaire pour trouver un texte de compromis, ou renvoyer le texte au Sénat. C'est ce que demandent les députés Les Républicains. Ce serait un scénario bien funeste pour des associations comme le Secours catholique, qui souhaiteraient voir le texte tout bonnement enterré.


La création d'un "appel d'air" n'existe pas


Pour François Mandil, délégué Finistère du Secours catholique, le Sénat a durci un texte qui déjà caricaturait et instrumentalisait les migrants : "on voit bien dans notre quotidien, dans les équipes qui accompagnent, qui soutiennent des personnes exilées, que ces personnes ne demandent qu'une chose,  de pouvoir travailler et de s'intégrer. Tous les bâtons dans les roues qu'on met aux personnes exilées, médiatiquement parlant, c'est peut-être efficace, mais dans la réalité, ça complique la vie des associations, des personnes bien sûr, des employeurs qui aimeraient pouvoir les embaucher plus facilement... On entend souvent cette expression "ça va être un appel d'air" depuis 40 ans, mais on ne l'a jamais vu ! Cela n'existe pas."

Titre :François Mandil, délégué Finistère du Secours catholique

Crédit :Yann Launay

Des régularisations de plein droit dans les métiers en tension


Le Sénat a durci le texte et a notamment supprimé l'article, qui permettait les régularisations de plein droit dans les métiers en tension. Un non-sens pour Jean-Claude Tanguy, coresponsable de l'équipe de Brest du Secours catholique. Un non-sens et une hypocrisie, alors que les migrants en situation régulière ou irrégulière sont indispensables à la vie économique du pays : "il n'y a pas une serre, pas une ferme où on ne trouve pas actuellement d'étrangers en train de ramasser des légumes. Il n'y aurait pas de légumes sur nos marchés si ces jeunes exilés ne travaillaient pas pour notre compte et dans les cuisines de nos restaurants, il y a non seulement des étudiants étrangers, mais également des personnes en situation régulière ou non. Notre économie fonctionne de cette manière là depuis fort longtemps, il ne faut pas se voiler la face, ces "gens là" sont indispensables à notre économie et je ne vois pas pourquoi on ne leur donnerait pas de titre de séjour."

Titre :Jean-Claude Tanguy, coresponsable de l'équipe de Brest du Secours catholique

Crédit :Yann Launay

Aboubacar empêché de travailler


L'adoption de ce texte pourrait venir encore compliquer des situations comme celle que vit Aboubacar, arrivé en France à l'été 2021. Il fuyait des persécutions en Guinée Konacri, son pays d'origine. Il attend en ce moment la réponse à sa demande d'asile.


Volontaire pour travailler dans des secteurs en tension, il en est empêché, faute de titre de séjour : "J'ai contacté une boite d'agroalimentaire, mais ils m'ont dit que je n'avais pas les documents me permettant de travailler et ils ne m'ont pas accepté. Partout où je postule, on me dit tu n'as pas droit de travailler ni de faire une formation, donc je suis bloqué partout. J'essaie de m'intégrer mais il faut attendre. J'ai fait du bénévolat au Secours Catholique ,et j'ai fait aussi du bénévolat à la Banque alimentaire pour ne pas rester comme ça... en attendant. Ils m'aident aussi beaucoup, et me donnent du courage."

Titre :Aboubacar

Crédit :Yann Launay

Ce mardi matin (12 décembre), le Gouvernement a choisi la voie de la commission mixte paritaire pour que 7 députés et autant de sénateurs cherchent un accord sur ce texte. Une option préférée à une seconde lecture au Sénat ou au retrait pur et simple du texte.