Plan Résilience : les professionnels entre colère et déblocage en Bretagne

Publié : 17 mars 2022 à 7h50 - Modifié : 17 mars 2022 à 7h56 par Dolorès CHARLES

Crédit : Yann Launay

Les dépôts pétroliers de Lorient et Vern s/Seiche débloqués hier soir, sans trop de résistance, après l'intervention des forces de l'ordre, mais à Lorient ce matin le blocage a repris. Le feu a été rallumé par les manifestants, et les engins bloquent toujours les accès.

Le plan de résilience présenté par Jean Castex est loin d'avoir convaincu : à Lorient, la déception était grande parmi les bloqueurs du dépôt pétrolier. Pour les manifestants, le gouvernement n'a pas mesuré la gravité et l'urgence de la situation, comme l'explique Vincent, un ambulancier qui emploie 24 salariés : "On ne peut travailler comme ça, on travaille à perte tous les jours. C'est bien beau de nous mettre du chômage partiel et des PGE, ce n'est pas ça qui suffira. Avant je payais 196 000 euros de carburant, aujourd'hui je suis à 348 000. Il y a un delta de 138 000 euros. Mon entreprise fait un bénéfice net de 80 000. Je ne sais pas où je vais trouver ce pognon, je ne le trouverais pas."

Titre :Vincent, ambulancier

Crédit :Yann Launay

Une action nationale lundi prochain ?


Claude Rault, patron d'une société de transport routier (Transports Rault, à Pontivy) reste largement sur sa faim, après les annonces du gouvernement : "Le chômage partiel, ça existait avant, le report de charges quand les sociétés sont en difficulté, on connaissait, ce qu'il y a de nouveau, c'est une aide spécifique que l'on avait demandée par véhicule, qui va être analysée dans les 4 jours. Malheureusement, on aurait bien aimé avoir un montant ce soir... Quelque chose qui aurait pu rassurer les transporteurs, les calmer, et dire "on rentre tous à la maison ce soir et c'est fini". Les transporteurs routiers pourraient passer à l'action dans toute la France lundi prochain, si les aides sont jugées insuffisantes.

Les manifestants de Lorient face aux forces de l'ordre

Crédit : Yann Launay

Titre :Claude Rault, patron d'une société de transport routier

Crédit :Yann Launay

Peu de résistance à Lorient, mais du dégoût


Brest, les professionnels du BTP maintiennent le blocage du port pétrolier ce matin. Hier soir, plus de 200 CRS et gendarmes ont été mobilisés pour lever le blocage du dépôt de Vern-sur-Seiche, près de Rennes. Face à la flambée des prix de l’énergie, une trentaine d’engins, tracteurs et camions bloquaient l’entrée depuis mardi. Ils ont quitté les lieux dans le calme après négociations.


Même chose à Lorient, où le dépôt pétrolier et la criée du port de pêche Keroman ont été évacués par les forces de l’ordre, mais des manifestants ont repris position à proximité en soirée. Ils étaient encore occupés à évaluer les annonces du premier ministre que les gendarmes mobiles et les policiers ont avancé pour les déloger. Ils ont opposé peu de résistance à l'image de Norbert Guillou, patron d'une entreprise de BTP : "On veut juste vivre de notre travail, on a des familles à nourrir, et voilà, on nous chasse. On fait semblant de nous comprendre, mais on ne nous comprend pas du tout. On ne nous a rien donné. Tant que les engins sont là, ce n'est pas la fin du mouvement, le dépôt est toujours bloqué."Yvon,  entrepreneur en travaux agricoles, est en colère et désabusé devant cette décision des autorités d'employer la force dès le deuxième jour de blocage : "Comme ils savent qu'on est pacifistes, qu'on est chefs d'entreprises. Je suis également élu dans ma commune, donc je ne suis pas quelqu'un qui a envie de taper sur des gens qui nous défendent... On savait que cela aurait fini comme ça, c'est tellement simple. Là aujourd'hui on demandait juste d'être respectés, parce que nous on respecte nos salariés, on voudrait bien les payer, par contre le 31 mars je ne suis pas sûr de pouvoir faire mes chèques..."


 


 

Titre :Yvon,  entrepreneur en travaux agricoles

Crédit :Yann Launay

Les pêcheurs ne reprendront pas la mer


De leur côté, les pêcheurs se sont réunis longuement, pour examiner l'aide promise de 35 centimes par litre de gasoil. Mais au final la décision de reprendre la mer n'a pas été prise, ils attendront de nouvelles réunions, notamment la réunion prévue au Guilvinec ce jeudi (à 10h). Une partie des pêcheurs était sceptique devant les modalités de versement de l'aide, et devant la différence de traitement entre leur profession et les autres manifestants, comme le souligne Philippe Lannezval, président du Groupement des pêcheurs artisans lorientais :


"On part tous dans un combat commun : les pêcheurs, les TP, les agriculteurs ... et puis on donne davantage à une profession qu'à une autre. C'est peut-être voulu. Moi, 35 centimes, vu que la tendance du baril est à la baisse, ça ne peut être que mieux dans les jours à venir, par contre s'il réaugmente, on se retrouvera dans le même schéma."


 

Titre :Philippe Lannezval, président du Groupement des pêcheurs artisans lorientais

Crédit :Yann Launay

Le blocage du dépôt pétrolier de Lorient se poursuit ce jeudi matin : le feu a été rallumé par les manifestants, et les engins bloquent toujours les accès. C'est un peu un retour à la case départ, après l'intervention des forces de l'ordre hier soir. Mais les manifestants pourraient être délogés à nouveau, peut-être dés aujourd'hui.