Pénurie. A Vannes, la pharmacie de Tohannic fabrique de l'amoxicilline

Publié : 13 janvier 2023 à 9h59 par Dolorès CHARLES

Crédit : Yann Launay

Pour pallier la pénurie de médicaments et en particulier de l'amoxicilline, des pharmacies sont autorisées à en fabriquer en France. Elles sont une quarantaine et c'est le cas de la pharmacie de Tohannic, à Vannes 56) où Yann Launay s'est rendu.

Vous y avez peut-être été confronté : certains médicaments sont décidément très difficiles à obtenir. C'est le cas pour certains antibiotiques comme l'amoxicilline. Pour pallier ce problème, l'Agence nationale de santé a autorisé 40 pharmacies à fabriquer elles-mêmes, à la main, de l'amoxicilline. C'est le cas de la pharmacie de Tohannic, à Vannes dans le Morbihan. Quatre employés s'y consacrent en ce moment, dans le laboratoire où étaient déjà préparés certains traitements spécifiques.


Du sur-mesure pour chaque patient


Est-ce compliqué de préparer de l'amoxicilline, quelles sont les différentes étapes de fabrication ? La réponse d'Antoine Rousseau, co-gérant de la pharmacie de Tohannic, interrogé par Yann Launay. "La matière première est commandée aux États-Unis... ce n'est pas un problème de matière première puisqu'elle est disponible. Vous faites de la pesée de la poudre, vous voyez s'il faut mettre de l'excipient ou pas, vous travaillez ce mélange et ensuite vous mettez ça dans des petites gélules une à une, ce qui est assez long comme manipulation à faire et cela part chez les pharmacies qui travaillent avec nous. Cela va de la Normandie jusqu'au su-ouest en passant par Paris... On a été autorisé à faire que de la pédiatrie de 0 à 12 ans, cela va être tout ce qui est otite, angine, etc. C'est du sur-mesure pour chaque patient !"

Titre :Antoine Rousseau, co-gérant de la pharmacie de Tohannic

Crédit :Yann Launay

La matière première est disponible


Il s'agit en fait de dosage, de conditionnement de l'amoxicilline, puisque la pénurie actuelle concerne bien les livraisons de médicaments en gélule, alors que la matière première, elle, reste disponible. Mais pourquoi en est-on arrivé là dans un pays comme la France ?


"Les blisters a priori étaient fabriqués en Ukraine, explique Antoine Rousseau. La partie plastique ou aluminium, vous avez vos cachets qui sont renfermés et cela s'appelle des "blisters" et pour ça a priori, il y a déjà un problème de fabrication. Ensuite, vous n'avez pas forcément les chaînes de production qui ont été arrêtées avec le covid, donc c'est compliqué de doubler les productions mais ce n'est pas aussi agile et facile à modifier et après, il y a aussi d'autres facteurs. Quand vous êtes sur une période de tension d'un médicament, il faut savoir qu'en France, le prix du médicament est le moins cher de l'Europe, donc si vous êtes industriels, vous vendez forcément au plus offrant ! Certains médicaments vont partir sur d'autres pays européens puisque c'est vendu deux ou trois, voire quatre fois plus cher dans d'autres pays européens."

Crédit : Yann Launay

Titre :Antoine Rousseau

Crédit :Yann Launay

Tous les ans, le prix du médicament baisse


Cette pénurie n'est pas forcément une surprise, pour Antoine Rousseau, et elle pourrait se prolonger ou concerner d'autres médicaments : "cela fait quinze ans que je travaille et que je vois des ruptures de médicaments, alors pas aussi importante que le paracétamol ou l'amoxicilline, mais cela fait quinze ans que l'on doit retrouver d'autres traitements pour des personnes puisqu'on ne peut pas leur fournir... Pour moi, c"est un contexte économique et (je le rappelle) le médicament en France est très peu cher...


Tous les ans, le prix du médicament baisse : on a beau avoir une inflation à 6 ou 7 %, eh bien encore au 1ᵉʳ janvier les médicaments ont encore baissé. Forcément, cela fait qu'on est encore moins concurrentiel sur les autres pays européens. Dès qu'il y aura de la tension, on sera en rupture. Il faudrait pouvoir remettre les zones de production en France peut être, cela serait une solution, mais est-ce que économiquement c'est viable, je ne sais pas."

Titre :Antoine Rousseau

Crédit :Yann Launay

Pour ce qui concerne l'amoxicilline, utilisée contre les maladies hivernales, Antoine Rousseau estime que la pénurie devrait se résorber d'ici un à deux mois. D'ici là, sa pharmacie continuera à fournir des confrères de toute la France...