Un projet alternatif aux éoliennes en baie de Saint-Brieuc
Publié : 16 mars 2021 à 6h28 - Modifié : 16 mars 2021 à 7h40 par Dolorès CHARLES
Crédit : (Photos droits réservés - HACE)
Les éoliennes en mer en baie de Saint-Brieuc : les pêcheurs ont saisi la Cour de justice européenne, mais ils ont aussi un projet alternatif : l'utilisation de la houle pour produire de l'hydrogène. Explications de Yann Launay
L'installation des éoliennes au large de la baie de Saint-Brieuc va-t-elle démarrer ? Les travaux devaient commencer dans les semaines qui viennent, en mer, pour fixer sur les fonds marins ces 62 machines de plus de 200 m de haut capables d'alimenter en électricité plus de 800 000 habitants. Mais une action en justice est toujours en cours : les pêcheurs ont saisi la Cour de justice européenne, qui ne devrait pas trancher avant la fin de cette année. Les pêcheurs ne font pas que s'opposer, ils proposent aussi un projet alternatif : l'utilisation de la houle pour produire de l'hydrogène.
Le projet HACE - Hydro Air Concept Energy
C'est le projet HACE, pour "Hydro Air Concept Energy", un nom anglais pour une start-up bien française, basée à Bordeaux, qui travaille avec des industriels bretons et des experts comme l'Ecole Centrale de Nantes. Il ne s'agit pas d'immerger des turbines pour utiliser les courants marins : ce ne seront pas des hydroliennes. Il s'agit d'utiliser les mouvements de la mer au niveau de la surface, comme l'explique Jean-Luc Stanek, fondateur de HACE :
"Il y a 2 500 ans, Archimède a montré que lorsqu'on posait un tube ouvert dans l'eau, au niveau de la mer, l'eau monte et descend dans le tube au passage des vagues. Lorsque l'eau descend, elle aspire l'eau et lorsque l'eau remonte, elle pousse l'eau : c'est un peu une pompe à vélo, ou une seringue... On bouche le haut du tube, on met des soupapes : l'air rentre dans le tube par une soupape, ressort par une autre soupape vers une turbine révolutionnaire. On produit de l'électricité, on fabrique de l'eau douce : cette eau douce est électrolysée, et cela forme un hydrogène super vert, compétitif..."
Pourquoi le projet HACE réussirait là, où tant d'autres ont échoué à utiliser la force des vagues ? :
"On a pu étudier les 2 000 brevets et 400 technologies existantes pour comprendre pourquoi il y avait des échecs. On s'est aperçu qu'ils vont tous chercher les grosses vagues... Elles ne sont pas là souvent... Alors que les toutes petites vagues sont là souvent... Donc on a inventé un système flottant qui récupère l'énergie des toutes petites vagues. Et comme les vagues sont plus fortes le soir et plus fortes en hiver, non seulement on est non-intermittent, mais on produit en phase avec la consommation..."
Utiliser l'électricité pour produire de l'hydrogène, directement en mer
L'objectif, en baie de Saint-Brieuc, est d'utiliser l'électricité pour produire de l'hydrogène, directement en mer. Le dispositif serait installé dans des caissons métalliques semblables à des conteneurs et reliés les uns aux autres, à fleur d'eau. L' hydrogène produit serait prélevé sur place, par des navires qui pourraient ainsi se ravitailler en mer, mais l'hydrogène serait aussi acheminé vers la terre ferme, sans câbles :
"ça va être acheminé sur des barges. Des petits bateaux de pêcheurs vont traîner les petits trains de barges... Les bateaux de pêcheurs vont "butiner" les champs dispersés de houlomoteurs, qui auront d'autres fonctions : on va faire des ports, pour permettre aux pêcheurs de s'abriter, d'avoir des viviers oxygénés en mer... On a besoin de gens qui connaissent la mer : plutôt que d'employer des grosses sociétés, faire un complément de revenu, quelque chose de gagnant-gagnant pour les pêcheurs permettra d'avoir une société plus verte, plus solidaire, avec une retombée économique locale..."
La société HACE attend l'autorisation de l'Etat pour mettre en place les premiers caissons flottants. Des caissons qui seraient fabriqués dans plusieurs ateliers de l'Ouest. Jean-Luc Stanek affirme que des investisseurs sont prêts à se lancer dans l'aventure, dès que l'Etat aura donné son feu vert.
Un reportage de Yann Launay.