Morbihan. Des tiny-houses construites par et pour des sans-abris

Publié : 26 octobre 2022 à 8h52 par Dolorès CHARLES

Crédit : Yann Launay

Les tiny-houses, ces petites maisons écologiques en bois, poussent un peu partout dans l'ouest. En Morbihan, l'association Amisep a ouvert un chantier de construction de mini-maisons par et pour des sans-abris. Reportage de Yann Launay près de Vannes.

Des tiny houses construites par et pour des sans-abris : c'est le principe du projet lancé par une association d'insertion morbihannaise. L'Amisep a ouvert un chantier de construction de mini-maisons à Séné, près de Vannes, où une quinzaine de sans-abris participe à toutes les étapes de la fabrication. Du montage de l'ossature bois à l'électricité, en passant par l'isolation en laine de chanvre ou la plomberie. L'objectif était de trouver une solution à des sans-abris parmi les plus marginalisés, pour qui les modes d'hébergement d'urgence classiques ne conviennent pas.


Simon Robitaille, de l'AMISEP - l'association morbihannaise d'insertion sociale et professionnelle : "cela peut être par exemple quelqu'un qui a un chien puisque dans le Morbihan, il n'y a aucun endroit pour accueillir des gens en demande d'hébergement d'urgence avec des animaux. Cela peut être quelqu'un qui a une addiction qui n'est pas encore tout à fait stabilisée, quelqu'un qui a des troubles psychiques qui peuvent être un peu envahissants et qui rendent difficile une cohabitation avec d'autres personnes... L'idée, à travers ce projet, est de trouver des solutions pour ces personnes en sachant qu'il y a tout un processus de sélection. Le premier critère, c'est d'être participant du chantier, même si ce n'est pas le critère premier pour choisir qui sera le futur habitant de la Tiny en construction. L'idée, c'est que ces personnes participent a minima au moins une ou deux journées par semaine."

Titre :Simon Robitaille, de l'AMISEP

Crédit :Yann Launay

Une réinsertion par le travail


L'association fournit les outils et tous les matériaux (environ 25 000 euros de matériaux pour une tiny house) et les participants au chantier sont bénévoles. Ils viennent tous les jours ou seulement une partie de la semaine, ils sont accompagnés par une animatrice sociale, Maëlys Tarib-Verrat, et supervisés par Bastien Gohier, éducateur technique :


"Je vais te laisser percer les montants. En gros, tu as un trou à faire ici et là, et le tour est joué. Les bénévoles découpent le bois, ils percent et vissent, ils font vraiment tout, même l'électricité et la plomberie. Je suis là pour les guider, mais il font vraiment tout... et cela se passe très bien. Ils ont tous du courage... Pour quelques personnes qui avaient des addictions assez fortes, le fait de passer du temps avec nous, leur faisait un peu oublier le fait de travailler, et d'avoir une occupation... on a vu leur état s'améliorer en tout cas, et venir plus avec le sourire et moins la gueule de bois le matin !"

Crédit : Yann Launay

Crédit : Yann Launay

Titre :Bastien Gohier, éducateur technique :

Crédit :Bastien Gohier, éducateur technique :

A la rue, "on ne dort pas sur les deux oreilles"


Chaque mini-maison est unique, et fait une vingtaine de m² au sol. Les deux premières sont déjà achevées, installées  sur place, près du hangar de construction. A terme, 6 tiny houses prendront place sur ce terrain. Yannick, après 4 ans à la rue, est l'un des deux premiers occupants. Il nous fait visiter son nouveau chez-lui : il y a "une salle de bain au fond avec toilettes, une petite cuisine et une mezzanine en haut qui fait chambre... et là, vous êtes dans mon salon, c'est confortable ! Moi, j'ai fait toutes les finitions. Je suis menuisier de profession. Je préfère ce style de logement, c'est plus petit. On n'est pas obligé d'avoir tout ce qu'on impose un logement habituel. Moi, je me contente de très peu, ça me suffit... c'est écolo, je suis très bien ici ! La rue, c'est autre chose, on ne dort pas sur les deux oreilles. J'ai fait un virage à 180, je vais reprendre le travail au plus vite..."


 

Titre :Yannick

Crédit :Yann Launay

Des sans-abris impliqués et plus responsables


L'idée de ces tiny houses en autoconstruction est aussi née des difficultés rencontrées pour reloger les sans-abris, comme le souligne Simon Robitaille : "on a du recul face à ça. On prend quelqu'un qui est dans la rue depuis des années. On lui donne un appartement tout beau, tout rénové, dans une barre de Vannes. Le pourcentage de chances que ça se casse la figure est super élevé, parce qu'à la fois ils investissent, pas le logement, ou alors ils vont y vivre comme ils ont vécu à la rue... ou alors certaines de leurs difficultés vont être trop dérangeantes par rapport à l'environnement, le voisinage, etc. Fort de ces constats, on s'est dit qu'en les impliquant dans la construction du lieu de vie, ils vont s'en sentir responsables. On veut qu'ils assurent un minimum d'entretien et de respect des lieux... et pour l'instant, c'est le cas. On sent aussi une envie de prendre soin d'eux, une volonté de revoir un médecin, de faire des premiers pas vers ça. Pour l'instant, c'est positif !"

Titre :Simon Robitaille

Crédit :Yann Launay

Au total, huit tiny houses devraient être construites à Séné d'ici la fin 2023, dont six resteront sur place, sur le site de Kercourse. Elles seront accompagnées d'aménagements extérieurs, de petits jardins, et pourront être achetées par leurs occupants.