MeToo Politique : le témoignage de Solène Le Monnier
Publié : 24 novembre 2021 à 22h57 - Modifié : 24 novembre 2021 à 23h04 par Dolorès CHARLES
Crédit : Pixabay
La bretonne Solène Le Monnier prend la parole en cette journée de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles. Elle fait partie des signataires de la tribune du Monde, pour dénoncer ce genre de violences dans le milieu politique.
Le monde politique a désormais son "Me Too" : dans une tribune parue dans le journal Le Monde, 286 femmes demandent au milieu politique de prendre ses responsabilités et d'écarter de ses rangs les auteurs de violences sexuelles et sexistes. Parmi les signataires, une Morbihannaise : Solène Le Monnier, conseillère municipale de Berric, petit bourg proche de Vannes. Il y a quelques mois Solène a démissionné de son rôle d'adjointe au maire, pour dénoncer le comportement de certains membres de l'équipe municipale :
"J'ai vécu beaucoup de choses au sein de mon équipe municipale, auxquelles je n'avais jamais été confrontée : des réfléxions assez stupides, comme quoi on est bonne qu'à s'occuper des enfants... On fera appel à nous pour choisir la déco. Les gestes qui leur paraissent anodins, ou qui sont pour eux de l'humur potache, peuvent atteindre leur cible, et psychologiquement c'est compliqué. Et quand on est à notre petit niveau des lanceurs d'alerte, en dénonçant ce système sexiste, on devient la personne à abattre..."
Titre :Solène Le Monnier, conseillère municipale de Berric,
Crédit :Yann Launay
Une place compliquée en milieu rural
Pour Solène Le Monnier, la présence des femmes dans les conseils municipaux est trop souvent un trompe-l'oeil, particulièrement en zone rurale : "la loi de la parité a été appliquée, on nous impose nous les femmes dans des conseils municipaux où les hommes n'ont pas forcément envie de nous voir. Nous, on y va parce qu'on y croit, on est confiantes, mais une fois qu'on est en place, la réalité est tout autre. Pour qu'il y ait une réelle égalité hommes - femmes, il faut qu'il y ait un travail commun des hommes et des femmes. Les femmes sont cantonnées à s'occuper des enfants de la cantine et des enfants de l'école, on reste associées à notre statut de maman, en fait. Cela reste vraiment "les hommes aux travaux et les femmes aux enfants", et nos compétences ne sont pas reconnues..."
Titre :Solène Le Monnier, conseillère municipale de Berric
Crédit :Yann Launay
Plus de sévérité de la part de la justice
De son côté, le maire de Berric a évoqué une "incompatibilité" entre l'ancienne adjointe et le reste de l'équipe. Une enquête est en cours. Comme les autres signataires de cette tribune, Solène attend une véritable exemplarité des élus locaux ou nationaux : elle attend plus de sévérité de la part de la justice comme des partis politiques, envers ceux qui ont été impliqués dans des violences sexuelles ou sexistes :
"On se rend compte qu'il y a énormément d'élus qui ont une implication, ou été condamnés, et qui reviennent sur la scène politique après leur peine d'inéligibilité. Ce n'est pas normal. On parle de personnes qui sont censées faire nos lois. Comment une personne pourrait travailler sur une loi par exemple sur les violences faites aux femmes alors que lui-même a été condamné pour des violences faites aux femmes ? Ce n'est pas cohérent, il y a un moment il va falloir sévir et être un peu plus ferme et ne plus laisser des personnes condamnées accéder au pouvoir."
Titre :Solène Le Monnier, conseillère municipale de Berric
Crédit :Yann Launay
Mais pour Solène, c'est aussi une question de formation : à ses yeux les élus locaux sont un peu trop livrés à eux-mêmes : "lorsqu'on est élu maire alors qu'on ne l'a jamais été, et qu'on n'a jamais été DRH dans la vie, ce n'est pas inné de savoir gérer une équipe... Pour moi le plus important, c'est de former les élus, et ensuite qu'il y ait un contrôle du fonctionnement d'une municipalité, aussi au niveau humain... Si on n'est pas capables déjà, nous, d'aller en sécurité à un conseil municipal, si émotionnellement on est déjà impactées par une situation qui est compliquée, on ne peut pas se pencher sur le dossier des citoyens."
Titre :Solène Le Monnier, conseillère municipale à Berric
Crédit :Yann Launay
Depuis 10 jours, les témoignages affluent sous le hashtag #MeTooPolitique, et la pétition mise en ligne sur change.org a déjà recueilli plus de 22 000 signatures.