Loup, y es-tu ? Des attaques de brebis sont relevées dans les Monts d'Arrée

Publié : 18 novembre 2022 à 8h05 par Dolorès CHARLES

Crédit : Yann Launay

Après une première apparition en mai dernier, la présence du loup se confirme en Bretagne : de probables attaques sur des brebis (avec consommation de viande) ont été relevées dans les Monts d'Arrée. Un "plan loup" est en cours d'élaboration pour aider les éleveurs à protéger leurs troupeaux.

Le loup serait bien de retour en Bretagne : après les images captées par un piège vidéo à Berrien, en mai dernier, ce sont des attaques de brebis, ces dernières semaines, qui montreraient qu’un ou plusieurs loups parcourent les Monts d’Arrée, dans le Finistère. Ces attaques font encore l'objet d'analyses, mais les services de l'Etat n'ont plus guère de doute. Tout comme Gilles Morvan, éleveur de brebis dans les Monts d'Arrée et président de la Fédération Nationale Ovine de Bretagne. Sa ferme est située dans la zone concernée par les attaques : il a vu les cadavres de brebis, et pour lui ce n'est pas l’œuvre de chiens errants :


"Il y a consommation de l'animal, ce qui n'est jamais le cas dans les attaques de chiens errants. Dans ma carrière, j'ai dû avoir une cinquantaine d'attaques de chiens errants. J'ai vu des bêtes blessées dans tous les sens, mais jamais de viande mangée. Et là, les éleveurs nous ont signalé qu'il y avait consommation de viande - à peu près 5 à 7 kilos ce qui correspond au repas d'un loup tous les 3 à 4 jours. Je m'attendais à l'arrivée du loup dans quatre ans. Les infos que nous avions laissaient penser qu'il avançait d'un demi département par an. On l'attendait en Bretagne en 2027 - 2030. Psychologiquement, j'étais prêt. Mais ce n'est pas parce qu'on est prêt à ce qui va arriver qu'on est content de le voir arriver."

Titre :Gilles Morvan, président de la Fédération Nationale Ovine de Bretagne

Crédit :Yann Launay

Loup, y es-tu, dans les Monts d'Arrée ?


Manifestement oui, et il aurait commencé à s'en prendre à des brebis. Plusieurs attaques recensées ces dernières semaines semblent refléter le mode opératoire du loup. Il s'agit peut-être d'un seul individu, possiblement celui qui avait été filmé en mai dernier à Berrien.  Les autorités envisagent d'ailleurs la mise en place d'un "plan loup" pour aider les éleveurs à protéger leurs troupeaux. Gilles Morvan élève 1 600 brebis, à Lopérec, dans les Monts d’Arrée, où des attaques attribuées au loup ont été relevées. Pour lui, pas question de céder à la psychose ou d’appeler à tuer le (ou les) loup(s),mais ce retour du loup n’est pas une bonne nouvelle :


"Ce que risque d'apporter l'arrivée du loup, c'est l'abandon de milieux naturels, qui ne correspondent qu'à des animaux d'élevage bovins, ovins. Des espaces naturels sensibles, des prairies humides où on ne pourra pas faire d'agriculture sans pâturage. Les zones céréalières, les zones qui auront d'autres possibilités s'adapteront. Dans les milieux naturels comme les Monts d'Arrée, cela va être assez compliqué de faire autre chose que de l'élevage d'herbivores et on risque de détruire des milieux naturels si on n'arrive pas à cohabiter avec le loup. Seul avantage du loup, c'est la régulation des cervidés. Par contre, ça va nettoyer les campagnes de certains élevages et ce n'est pas mon avis, pas du tout favorable à une certaine biodiversité."

Crédit : Yann Launay

Titre :Gilles Morvan, président de la Fédération Nationale Ovine de Bretagne

Crédit :Yann Launay

Au nom des éleveurs bretons, Gilles Morvan demande à l'Etat de l'aide pour protéger les troupeaux, et il salue l'annonce d'un "plan loup" pour la Bretagne. Un plan loup qui n'est pas le lancement d'une grande chasse au loup, espèce protégée par la Convention de Berne.


Attention, le loup n'est pas responsable de tout


Certains éleveurs s'inquiètent, mais ce n'est pas le cas de Marie Ménager. Pourtant le loup n'a rien d'abstrait pour Marie, qui est à peu près certaine de l'avoir vu passer dans sa ferme de Plounéour-Ménez, en mai dernier : une rencontre qu'elle avait signalé à l'OFB - l'Office français de la biodiversité. Le loup ne s'en était pas pris à ses chèvres, et Marie n'a d'ailleurs rien changé à ses habitude :


"On a nos chèvres qui rentrent et dorment toujours en bâtiment la nuit : elles rentrent même quand le bâtiment est ouvert l'été, elles rentrent d'elles mêmes, donc c'est vrai qu'en plus, notre configuration fait qu'on n'est pas plus inquiété que ça par rapport à d'autres (éleveurs). Attention à ne pas mettre toutes les attaques sur le loup : les chiens errants ont toujours existé et ils continueront à exister. Je mettrai un petit bémol à ce niveau, même si je pense qu'à partir du moment où on sait que le loup est revenu, il faut quand même y prêter cas, et mettre des choses en place si besoin."

Titre :Marie Ménager

Crédit :Yann Launay

Le loup fait partie de la nature


De leur côté, les habitants des Monts d'Arrée sont nombreux à voir plutôt d'un bon œil le retour du loup. Sur le marché de Huelgoat, il était en tous cas difficile de trouver des habitants hostiles au loup : "Je trouve que c'est très bien et ça ne me pose pas de problème. S'ils étaient là avant, je ne vois pas pourquoi ce serait un problème son retour. Après, il faut s'adapter. Je crois qu'il y a des chiens qui peuvent garder les troupeaux, je pense que c'est possible (...)  Il faut de tout quoi dans la nature pour équilibrer et le loup fait partie de la nature... J'ai eu des moutons pendant des années et j'ai eu des dizaines de moutons tués par des chiens. On n'empêche pas les gens d'avoir des chiens et pourtant, le chien a fait des dégâts terribles sur les troupeaux. Il n'y a pas sujet à polémique, en vérité."


Titre :Les habitants

Crédit :Yann Launay

Une première réunion devrait avoir lieu début décembre, qui rassemblera éleveurs, élus, associations et services de l'Etat, pour commencer l'élaboration du plan loup breton.