Laureen est partie de Lorient pour ramener des Ukrainiens

Publié : 8 mars 2022 à 17h34 - Modifié : 10 mars 2022 à 8h17 par Dolorès CHARLES

Laureen et ses amis à la frontière polonaise

Crédit : Yann Launay

Une petite équipe de bretons était partie du Morbihan vendredi pour un aller-retour en Ukraine (frontière polonaise), afin d'apporter des denrées, et de ramener en sécurité en France quelques réfugiés. Mission accomplie.

Emporter de l'aide alimentaire à la frontière ukrainienne, et revenir avec des réfugiés : c'était l'objectif de quatre Morbihannais, partis vendredi dernier de Lorient, et rentrés hier (lundi). Laureen, mandataire immobilier à Plouay, souhaitait apporter une aide concrète et rapide : elle a lancé une cagnotte en ligne et avancé l'argent pour louer deux vans, qui ont permis d'emporter des vêtements, des couvertures, de l'aide médicale donnée par l'hôpital Charcot, et de l'aide alimentaire. Laureen, et trois de ses amis, se sont relayés au volant pour couvrir les 2.300 kilomètres du trajet qui sépare Lorient de la frontière entre la Pologne et l'Ukraine :


"Nous sommes arrivés à Krakovets, à un premier check-point, avec une énorme file de camions, de conteneurs, de mini-bus vers l'Ukraine : c'était des Ukrainiens qui ramenaient des vivres, peut-être des armes, je ne sais pas, en tous cas d'énormes poids-lourds, remplis de denrées. Ou des personnes polonaises ou ukrainiennes, qui allaient récupérer les leurs. Là on a déposé les denrées, avec des palettes, il y avait une organisation établie par la Pologne. On a croisé beaucoup d'Allemands, et même des Suisses..."

Titre :Laureen

Crédit :Yann Launay

Est-ce que vous pourriez les ramener à Orléans ?


Après avoir déposé le matériel dans un entrepôt proche de Krakovets, Laureen et ses amis se sont rendus à quelques kilomètres de là, dans un vaste hangar qui abritait des centaines de réfugiés. Un choc pour Laureen :


"Des lits de camps à n'en plus finir... Des gamins, des femmes enceintes... Des femmes qui pleurent, mais qui ne hurlent pas, c'est très calme, et puis quelqu'un au micro qui parle en ukrainien de places. Il y a un QR code, on doit mettre le nombre de places que nous avons, et dans quel pays nous allons. Et on a décidé de faire aussi le côté manuel : prendre une grande feuille blanche, qu'on surélève... On a tourné dans ce grand hangar pendant trois heures, pour trouver des personnes... On est tombé sur une famille, qui ne parlait pas français : elle m'a passé son portable, et m'a passé la personne qui parlait français dans sa famille, qui m'a dit "Est-ce que vous pourriez les ramener à Orléans" parce qu'elle a sa mère là-bas."

Titre :Laureen

Crédit :Yann Launay

Peu de candidats au départ vers la France 


Laureen pensait ramener une douzaine d'Ukrainiens jusqu'en Bretagne, mais au final ce sont sept personnes qui ont pris place dans les vans, et qui ont été déposées, pour l'une à Francfort, en Allemagne, et pour les autres à Orléans, où réside un de leurs parents. En fait, parmi les réfugiés accueillis dans ce centre polonais, les candidats au départ vers la France étaient peu nombreux, comme l'explique Laureen à Yann Launay :


"Les Ukrainiens ne veulent pas forcément venir en France, ils veulent rester près de chez eux, ils veulent surtout rentrer chez eux, donc (il y a la ) volonté de rester pas trop loin... Et puis la Bretagne c'est l'autre bout de la France, donc c'est encore plus loin... Et je pense que les Ukrainiens ne réalisent pas la situation. Ils ne réalisent pas que peut-être qu'ils ne rentreront pas demain dans leur pays : je pense qu'ils espèrent tous que ça dure une semaine encore et qu'ils puissent rentrer. C'est quelque chose que l'on a énormément ressenti sur place..."

Titre :Laureen

Crédit :Yann Launay

Mission accomplie


Même si Laureen et ses amis sont rentrés seuls à Lorient, la mission est accomplie : les dons ont été livrés au plus près des besoins, et sept Ukrainiens ont été déposés à Francfort et Orléans, où ils ont pu retrouver des proches. A Orléans, l'émotion a été vive au moment de déposer 6 membres d'une même famille : une femme d'une trentaine d'année, une femme âgée et quatre jeunes enfants :


"On ne parle pas dans ces moments-là, il n'y a pas de mots... On s'est serrés dans les bras... et par contre sa mère depuis hier me mitraille de messages d'amour... On gardera le lien, c'est une évidence. Là, j'arrive en France pour déposer les véhicules que j'ai loué, et je vois des gens hyper aigris, et je me dis : ils ne se rendent pas compte de la chance qu'ils ont finalement. Je me sens vivante, d'avoir accompli cette mission, ça donne du sens... Je me dis que demain, ça pourrait nous arriver en France, ou à notre progéniture. C'est plutôt dans un échange d'entraide que je l'ai fait. Mais je n'y retournerai pas : j'ai un enfant, et mon entreprise... Mais je sais qu'il y a bon nombre de personnes qui m'ont contactée pour retourner, et je pourrai remettre cette logistique en place volontiers."


 

Titre :Laureen

Crédit :Yann Launay