La prison de Carquefou déborde : les agents pénitentiaires sont épuisés

Publié : 23 novembre 2022 à 15h52 - Modifié : 24 novembre 2022 à 9h44 par Emilie PLANTARD

William Cozic, secrétaire FO Justice devant la maison d'arrêt de Carquefou

Crédit : Emilie Plantard

Le personnel de la maison d’arrêt de Carquefou, près de Nantes, est en souffrance. Après plusieurs agressions ces dernières semaines, les agents fatiguent et ne voient pas le bout du tunnel. Le principal syndicat demande que leurs difficultés soient mieux entendues par la direction.

Les conditions de travail s’aggravent à la maison d’arrêt de Carquefou, en Loire-Atlantique. Plusieurs agents ont subi des agressions ces dernières semaines alors que le contexte se dégrade. Actuellement près de 780 détenus y sont incarcérés pour une capacité de 510 places, et une vingtaine de postes d’agents sont vacants. Pour William Cozic, secrétaire FO Justice à Nantes, interrogé par Emilie Plantard : "cela fait plusieurs mois qu’on est en difficulté que ce soit au niveau de la surpopulation ou du manque d’agents mais la situation s’est considérablement dégradée ces dernières semaines, notamment avec la violence qui n’a plus de limites. On a eu des collègues attaqués avec une lame, un passage à tabac d’un collègue sur la coursive, on a aussi un collègue qui a été victime d’une tentative d’étranglement. Les agents cogitent beaucoup..."


Pour rappel, les agents avaient débrayé le 5 novembre dernier en soutien à leur collègue.


Bagarres, colis jetés, stupéfiants... de plus en plus d’incidents


Après un ralentissement d’activité lié aux confinements de 2020, les agents ont constaté une augmentation importante des incidents en 2022. Des incidents qu’il faut gérer au quotidien avec un effectif d’agents limité. William Cozic détaille que "par rapport à 2021, au 1er octobre les violences entre détenus ont triplé. Pour les saisies de stupéfiants, on était à 16 kg au 1er octobre contre 5 sur toute l’année 2021. On a retrouvé plus de 600 téléphones portables au 1er octobre, contre 200 l’année dernière. Tout explose et ça génère des tensions."

Titre :William Cozic, secrétaire FO Justice à Nantes

Crédit :Emilie Plantard

Des activités indispensables mais difficiles à gérer


Le personnel multiplie les heures supplémentaires pour pallier les problèmes de recrutement, souvent de 80 à 100 heures par mois. Mais ils dénoncent aujourd’hui les activités prévues prochainement pour les détenus, qui demandent une attention particulière de la part des surveillants. "Notre discours est très clair, explique le délégué FO Justice, on n’est pas contre les activités de réinsertion et tout ce qui peut améliorer la qualité de vie de la population pénale, mais quand on n’a pas les moyens de le faire, on ne le fait pas. Là, la direction ne veut rien entendre, il faut multiplier les activités comme faire un concert, aller au cinéma, il y a un projet d’activité de rapprochement des liens familiaux pour Noël mais le personnel est à bout, il faut se recentrer sur nos missions."


Gérer la crise...


Actuellement, six agents sont en arrêt de travail à la maison d’arrêt et le recrutement des agents pénitentiaires est particulièrement difficile. Au quotidien, le personnel compense avec des heures supplémentaires mais il fatigue. William Cozic demande surtout de l’indulgence de la part de la direction. "Ce qu’il nous faut c’est du personnel mais là on est sur un horizon septembre 2023 avant d’avoir une possible amélioration des effectifs donc on sait qu’on va être dans cette situation jusqu’en septembre 2023. Si de la direction au personnel, il n’y a pas de cohésion et d’humanisme, on va vivre des drames. Il faut que la direction du centre pénitentiaire se remette en cause."


Les conditions sont également difficiles pour les détenus, qui sont souvent 3 par cellule. 6 détenus de l’unité protégée se sont suicidés en 2022.