Grand Froid : rencontre avec des sans-abris, venus se réchauffer à "La Maison Bleue" de Rezé
Publié : 9 janvier 2024 à 18h59 - Modifié : 10 janvier 2024 à 9h10 par Dolorès CHARLES
La Maison bleue de Rezé (44)
Crédit : Tom Rossi
A l’exception du Maine-et-Loire et de la Mayenne, tous les départements de l’Ouest resteront ce mercredi (10 janvier) en vigilance jaune Grand froid. Le thermomètre devrait encore être négatif au lever du jour (jusqu’à -5°), et ne pas dépasser les 2° en journée. Rencontre près de Nantes avec des sans-abris accueillis à La Maison, tandis qu'à Rennes des enfants dorment encore dans des écoles, faute de mieux.
Avec les températures négatives, les plans "Grand froid" sont activés dans l'ouest, comme un peu partout en France. Des places d'hébergement d’urgence supplémentaires sont ouvertes pour les sans-abris. En France, il y a environ 205 000 places pour 330 000 SDF. Ils étaient deux fois moins il y a 10 ans. En journée aussi, les températures sont en dessous de 0, et pour accueillir les plus vulnérables, il y a d'autres structures comme La Maison bleue de Rezé, près de Nantes (44). Ici, des bénévoles accueillent tous les matins (sauf le mercredi) entre 40 et 70 sans-abris. Ils viennent se réchauffer, manger et parfois se doucher, après une nuit passée dehors pour certains.
"Qu'on active le plan Grand froid quand il fait froid, c'est une bonne chose mais peut-être qu'il faudrait réfléchir à ce qu'il y ait plus de structures ouvertes tout le temps"
Tom Rossi a rencontré Daniel, bénévole au sein de l'association "La Maison". "On en a accueillis quelques uns ce matin vraiment frigorifiés. Ils avaient de la peine à s'exprimer tellement ils avaient froid ... Pour certains, il y a très longtemps qu'ils sont dehors, et pour d'autres, trouver un endroit c'est compliqué même avec le plan "Grand froid". Ils ne sont pas forcément au courant des mesures du plan et ensuite les places sont "chères" ! Qu'on active le plan "Grand froid" quand il fait froid, c'est une bonne chose mais peut-être qu'il faudrait réfléchir à ce qu'il y ait plus de structures ouvertes tout le temps, de jour comme de nuit, ce qui n'est pas forcément le cas."
Titre :Daniel, bénévole au sein de l'association "La Maison"
Crédit :Tom Rossi
Sébastien et Didier, sans abris et révoltés
Pour Sébastien et Didier, venus se réchauffer à Rezé, le gouvernement doit faire mieux que les 120 millions d’euros annoncés pour ouvrir 10 000 places d'hébergements d’urgence supplémentaires. Tous deux sont révoltés : "ils disent qu'il y a 300 000 sans domicile fixe en France, mais en fin de compte il y en a sûrement plus. Il y en a au moins le double, selon Didier. Les gens appellent le 115 mais ils sont injoignables ! Dans les associations, je vois de plus en plus de monde, c'est un délire complet ... on est en 2024!"
"Il y a de la place, mais ce n'est pas exploité et je trouve ça abominable car il y a tellement de gens à la rue, regrette avec émotion Sébastien. J'ai eu l'idée de créer une association un peu comme la Fondation Abbé Pierre. J'ai découvert qu'il y avait des bâtiments plus ou moins abandonnés et (je voulais) les rénover pour héberger les gens en difficulté."
En France, il y a plus de 3 millions de logements vacants. A Paris, le sénateur communiste Ian Brossat a lancé une pétition pour demander la réquisition des logements vides. Là-bas, 18,8% du parc immobilier était inoccupé en 2020.
Nantes - 09 janvier 2024
Crédit : Dolorès Charles
Titre :Didier et Sébastien
Crédit :Tom Rossi
Aujourd'hui à Rennes "23 enfants dorment dans les écoles avec leurs parents, cela veut dire qu'ils n'ont pas eu de proposition pour un hébergement..."
La Bretagne connaît aussi sa première vague de froid de l’hiver, et outre le plan "Grand froid", les préfectures ont conforté l’accueil des plus fragiles. En Ille-et-Vilaine, les horaires des accueils d’urgence sont étendus et le nombre de maraudes a été doublé sur Rennes, Fougères et Saint-Malo. A Rennes, un collectif baptisé "Elèves protégés" alerte depuis plusieurs mois sur la situation de familles et d’enfants qui dorment dans la rue. Il est constitué de parents d’élèves d’une cinquantaine d’établissements scolaires de la ville.
Des solutions provisoires ont été trouvées, mais elles restent précaires estime Séverine du collectif, interrogé par Valentin Monnier. "Aujourd'hui, il y a 23 enfants qui dorment dans les écoles avec leurs parents, cela veut dire qu'ils n'ont pas eu de proposition par la préfecture pour un hébergement. Il y a eu des efforts de fait très dernièrement puisque trois familles qui dormaient dans des tentes dehors ... ont été orientées par le 115 et vont être hébergées dans un hôtel en tant qu'hébergement d'urgence. Mais une cinquantaine de personnes reste pour l'instant dans un hangar aux Gayeulles qui pour des raisons de sécurité et de salubrité, va devoir fermer..."
Titre :Séverine du collectif "Enfants protégés"
Crédit :Valentin Monnier
Selon Séverine, le dialogue est rompu avec la Préfecture d'Ille-et-Vilaine (contrairement à la mairie). "On peut dire qu'on est en colère, et un peu décontenancés par l'absence d'échange".
Si vous souhaitez proposer un hébergement d’urgence aux enfants et à leur famille, vous pouvez contacter des associations à Rennes comme "Un toit c’est un droit" ou "Bienvenue."