Eyes3Shut : les lunettes bretonnes en 3D nous en mettent plein la vue !

Publié : 27 février 2023 à 8h08 par Dolorès CHARLES

Crédit : Yann Launay

Près de Plouzané (29), une petite société fabrique des lunettes actives haut de gamme, pour les spectateurs amateurs de films 3D au cinéma. Ces lunettes rechargeables et prêtées aux spectateurs cartonnent avec entre autres "Avatar La voie de l'eau" de James Cameron, et ce n'est pas fini, d'autres films sont attendus en salles.

La 3D au cinéma n'est pas morte ! Elle est relancée par "Avatar 2", et une entreprise finistérienne spécialisée connaît du même coup une renaissance : Eyes3shut fabrique des lunettes actives haut de gamme dans son atelier de Plouzané, près de Brest. Fondée en 2008, la société avait vu son activité décliner en même temps que l'intérêt du public pour la (mauvaise) 3D. Mais depuis quelques mois, la production a repris, boostée par la sortie du nouveau film de James Cameron, comme l'explique Samir Bentahar, directeur technique chez Eyes3shut interrogé par Yann Launay.


Le rush pour "Avatar"


"Les cinémas ont mis du temps à se débloquer et à se décider... et ils ont commencé à se réveiller fin août - début septembre. Ils nous ont laissé trois mois pour leur fournir ce qu'il faut pour projeter "Avatar 2" donc c'était vraiment le rush. On a dû embaucher une quinzaine de personnes pour pouvoir produire, et fournir tous ces clients. On en vend en Inde, en Chine, beaucoup en Espagne... On a beaucoup travaillé sur la robustesse de la lunette, contrairement à nos concurrents qui ont des lunettes qui cassent très rapidement... Un verre fragile à l'intérieur, et c'est un gros avantage par rapport aux concurrents."

Titre :Samir Bentahar, directeur technique chez Eyes3shut

Crédit :Yann Launay

Le fonctionnement de ces lunettes actives


La société bretonne a mis au point une technique qui fait de ses lunettes les meilleures du marché, validées par James Cameron lui-même. Ce sont des lunettes actives, à cristaux liquides, bien différentes des lunettes passives, plus répandues, avec leurs "verres" souples. Mais comment ça marche, et qu'est-ce qui explique la différence de qualité ?


Pour Samir, "le principe est simple on ferme un œil, on ouvre l'autre de manière alternative et très rapidement, à une fréquence de 144 images par seconde, alors que la lunette passive, elle, travaille sur un système de polarisation et des filtres, mais ce n'est pas très efficace. Le système passif, lui, déforme complètement les couleurs. On a le gostyn, c'est quand vous voyez en fait l'image fantôme dans un film 3D, on va projeter deux images sur l'écran un petit peu décalé, ce qu'on appelle la parallaxe. Avec le système passif, on a un passage d'un petit peu de cette image fantôme, de cette image décalée et chez nous, on n'a pas cette image fantôme et on a une image très pure. On a vraiment la sensation de voir en relief comme dans la réalité."

Crédit : Yann Launay

Titre :Samir Bentahar, directeur technique chez Eyes3shut

Crédit :Yann Launay

Une production limitée


La production de l'atelier breton reste limitée, et ce n'est pas seulement une question de prix. Ces lunettes actives, rechargeables, sont prêtées aux spectateurs, dans les cinémas, et non vendues, comme les lunettes passives. C'est ce qui explique le nombre réduit de salles équipées, malgré la qualité supérieure : "il y a des cinémas, principalement des multiplexes, qui ne veulent pas mettre une personne pour récupérer des lunettes et les mettre à charger? Ils préfèrent donner des lunettes, qui sont jetées à la poubelle et qui sont payées par le consommateur, au lieu de donner une lunette qu'il faut récupérer après pour la mettre à changer. Au niveau investissements du cinéma, c'est le même prix puisque nos lunettes coûtent cher mais derrière, il n'y a aucun investissement à faire parce qu'elles sont toutes adaptées aux projecteurs. Alors que les lunettes passives, il faut quand même changer l'écran, ajouter un dispositif devant le projecteur. Après, il y a le côté confort, bien sûr, de la lunette passive, très légère (dix grammes) quand la nôtre fait 50 grammes mais on y travaille aussi !"

Titre :Samir Bentahar, directeur technique chez Eyes3shut

Crédit :Yann Launay

L'avenir appartient à la 3D de qualité


Les lunettes actives comme celles de Eyes3shut équipent une minorité des salles de cinéma, mais les choses pourraient changer, puisque l'avenir est à la 3D de qualité : "il y a eu des avancées en terme de post-production parce que c'est ce qui a plomb la 3D dans les années 2013-2014. Après Avatar, tout le monde était déçu des films qui sont sortis par la suite, n'importe quel film était remastérisé en 3D et les gens n'étaient pas contents. Ils ont vu des films comme Star Wars, etc. mais la 3D n'était pas nécessaire. Les studios ont compris qu'en fait, cela ne sert à rien de faire de la 3D pour faire de la 3D, donc ça va être plutôt tout ce qui est synthèse, tout ce qui est film d'action... Là, il y a plein de Marvel, des films de synthèse, des dessins animés qui vont sortir en 3D, qui vont être des succès parce qu'ils sont faits pour. On ne fait pas un film 3D comme un film normal, il faut le penser dès le scénario !"

Titre :Samir Bentahar, directeur technique chez Eyes3shut

Crédit :Yann Launay

Sur l'année 2023, une douzaine de productions à grand spectacle doivent sortir en 3D, dans les salles de cinéma, comme "Mario Bros", "Indiana Jones" ou "La Petite Sirène".


De son côté, "Avatar la Voie de l'eau" a dépassé les 2 milliards de spectateurs et vient d'entrer dans le top 5 des films les plus vus au cinéma. En termes de recettes, le marché français est le troisième, pour le film de Cameron, derrière les Etats-Unis et la Chine, et la moitié des billets vendus en France l'étaient pour des séances 3D.