Cinéma. L'agro-industrie bretonne visée dans "Les Algues vertes"
Publié : 16 juin 2023 à 8h46 - Modifié : 16 juin 2023 à 9h03 par Dolorès CHARLES
Crédit : Yann Launay
Le film "Les Algues vertes" est projeté en avant-première un peu partout en Bretagne avant sa sortie nationale le 12 juillet prochain. Un film sur l'histoire de la journaliste bretonne Inès Léraud, qui a enquêté sur les algues vertes et les impacts de l'industrie agro-industrie bretonne.
Le film "Les Algues vertes", tiré de la BD, sortira dans toute la France le 12 juillet au cinéma, mais de nombreuses avant-premières sont organisées dès maintenant en région Bretagne. Une volonté de la coscénariste Inès Léraud, et du réalisateur, Pierre Jolivet (à qui on doit des films comme "Ma petite entreprise" et "Mains armées"). Le film retrace les investigations de la journaliste Inès Léraud, installée en Bretagne depuis 2015 pour enquêter sur les algues vertes et sur l'agro-industrie bretonne. Le tournage s'est déroulé principalement dans les Côtes d'Armor : à Hillion, Saint-Michel-en-Grève, Trémargat, Lannion. Le tournage n'aura pas toujours été simple : plusieurs collectivités ayant refusé de l'accueillir.
Plus on vous interdit des choses, plus vous êtes galvanisé et vous vous dites je vais le faire quand même !
Il a fallu parfois ruser, comme l'évoque Pierre Jolivet à Yann Launay. "Il y a plein d'endroits où on n'avait pas le droit de tourner, pas le droit de poser un pied de caméra, ni de faire un travelling. Voilà, donc on avait plein de potes, d'associations qui nous gardaient des places de parking, et qui nous les libéraient à 7 h du matin quand on arrivait. Il nous est arrivé de faire un faux accident de vélo pour pouvoir bloquer une route pendant trois minutes, juste le temps que je puisse faire mon plan... Plus on vous interdit des choses, plus vous êtes galvanisé et vous vous dites je vais le faire quand même ! Je crois qu'il y a plein de communes où ils ne peuvent pas dire oui parce que dans leurs électeurs, il y a énormément d'agriculture intensive. L'Agro industrie est là, derrière et vis à vis d'une partie de leurs électeurs, ils ne pouvaient pas dire oui !"
Titre :Le réalisateur Pierre Jolivet
Crédit :Yann Launay
"Ce n'est pas un film manichéen", pour Pierre Jolivet
La responsabilité de l'agriculture industrielle dans le phénomène des algues vertes est clairement dénoncée, mais Pierre Jolivet se défend d'avoir signé un film manichéen, avec d'un côté les gentils écologistes et de l'autre les méchants agriculteurs : "l'histoire est plus compliquée : il y a beaucoup d'agriculteurs qui sont pris en otage par ce système. Ils ne peuvent pas en sortir parce qu'ils sont endettés, parce qu'ils dépendent de la coopérative etc. Ils sont devenus, pour beaucoup, des ouvriers agricoles alors que leur idée de départ, c'était d'être agriculteur, et pas ouvrier agricole... Il y a des agriculteurs qui prennent la parole dans les débats, ce n'est jamais vindicatif, (et ils le disent que leur vie est très compliquée). Ce sont toujours des moments assez forts et émouvants. Je crois que si les agriculteurs passent au dessus de leur a prioris et vont voir le film, ils ne vont pas sortir du tout en colère, au contraire."
Titre :Le réalisateur Pierre Jolivet
Crédit :Yann Launay
Un public largement conquis
La curiosité des spectateurs bretons est au rendez-vous : pour l'avant-première de Brest, hier (jeudi 16 juin) soir aux Studios, le film a été projeté dans trois salles, devant l'affluence. A la sortie, le public est largement conquis : "d'un point de vue artistique, j'ai bien aimé les couleurs, la façon de filmer, cela passe très vite et on est vraiment pris par l'histoire de cette journaliste. Les faits sont décrits de façon très précise et il y a un peu le côté policier et il ne faut pas avoir peur car ce n'est pas un documentaire. Moi, j'ai retenu ma respiration pendant tout le film et pourtant j'avais lu la BD et j'ai été complètement happée par le film ! J'espère qu'il aura une très large diffusion : je me souviens quand j'étais petit, j'allais sur la plage de Plestin les Grèves avec mes parents... et la plage était avec du sable fin, on pouvait aller se baigner et aujourd'hui, ce n'est plus le cas..."
Titre :Les spectateurs interrogés par :
Crédit :Yann Launay
Dénoncer, oui mais certains font du bon boulot !
Parmi les spectateurs de l'avant-première de Brest, quelques agriculteurs, comme Patrick, un éleveur finistérien qui reconnaît sans problème les excès de l'agriculture industrielle, mais qui estime que le film manque tout de même de nuance : "Dénoncer oui, mais il y en a qui font du bon boulot. 80 % des agriculteurs font du bon boulot. Moi je me sens insulté alors que je fais du bon boulot. Selon moi, le fait de toujours dénoncer sans encourager cela écoeure beaucoup les agriculteurs : ils sont montrés du doigt en permanence. On n'est pas les seuls en cause dans les algues vertes, les stations d'épuration ne sont pas aux normes, elles sont sous dimensionnées et rejettent les phosphore, très nocif. Le phosphore de nos machines à laver à tous."
Titre :Patrick, un éleveur finistérien
Crédit :Yann Launay
Les Algues Vertes, de Pierre Jolivet, avec Céline Sallette, sera projeté en avant-première :
- ce samedi 17 juin à Cesson-Sévigné, près de Rennes, au Sévigné
- ce dimanche 18 juin à Carantec, au cinéma Etoile
- le 27 juin à Nantes, au Katorza,
- le 29 juin à Carhaix, au Grand bleu
- le 3 juillet à Sarzeau, au cinéma l'Hermine
Le film doit aussi être projeté à l'Assemblée nationale et au Sénat. Sortie nationale le 12 juillet, dans plus de 300 salles de France.