A Laval, les urgentistes ont besoin de soutien

Publié : 9 novembre 2021 à 6h21 - Modifié : 9 novembre 2021 à 9h22 par Emilie PLANTARD

Crédit : @Caroline Brémaud/Twitter

Le service des urgences du Centre Hospitalier de Laval ferme la nuit et le week-end depuis le 1er novembre dernier. Si une solution provisoire a été trouvée et sera effective à partir de mercredi, ce contexte épuise les soignants, qui aimeraient trouver le soutien de la population.

Aux urgences de l’hôpital de Laval, on compte 5 médecins (équivalents temps plein) quand il en faudrait 16... Cet été, avec les vacances, il n’y avait qu’un seul médecin de garde la nuit. Voilà, entre autres, ce qui a conduit la direction, le 1er novembre dernier, à fermer le service chaque soir entre 18H et 8H30 et chaque week-end. La conséquence d’un manque chronique de personnel, comme partout en France. Aujourd’hui, Caroline Bremaud, médecin, cheffe des urgences du CH de Laval est désabusée. Elle avait prévenu, signalé les dysfonctionnements, tiré la sonnette d’alarme… Rien n’a bougé. Encore maintenant, elle craint que cette situation, si grave soit-elle, ne devienne la normalité :


"Ça fait depuis le mois d’avril qu’on alerte les autorités sur le fait que ça ne va pas passer. On s’est tués à la tâche cet été pour ne pas que ça ferme, et finalement, ce qui était impensable, inimaginable, inenvisageable, tous les qualificatifs ont été dits et finalement le 1er novembre on a fermé les urgences de Laval et vous savez quoi ? La terre a continué de tourner. Il n’y a pas eu de morts et du coup je me dis, ça va continuer dans le silence le plus total, l’indifférence, on dégrade l’offre de soin, on met en danger les patients et ça ne deviendra plus si grave et si impensable. Ça sera « bon ben, on a écrit un protocole, on l’active et voilà, c’est tout ». Sauf qu’on ne peut pas s’habituer à la médiocrité."

Titre :Caroline Bremaud, cheffe des urgences du CH de Laval

Crédit :Emilie Plantard

On peut tous les aider...


En attendant la réouverture du service, les urgences vitales sont assurées par le SMUR. Une réserve sanitaire sera mise en place mercredi 10 novembre, mais cette solution n’est que provisoire et Caroline Bremaud, médecin, cheffe des urgences du CH de Laval ne peut que le regretter :


"En fait ça va durer 15 jours et après on repart dans de la galère… L’avenir c’est compliqué, on a peut-être quelques perspectives sur l’année prochaine, on a notre docteur junior qui sera en autonomie à partir de janvier, mais il ne va pas compenser tous les départs. Et si, à un moment, il n’y a pas de prise de conscience au niveau national qu’il faut prendre soin de l’hôpital public, on va dans le mur complètement, c’est une catastrophe. Il faut absolument que la population nous soutienne !"

Titre :Caroline Bremaud, cheffe des urgences du CH de Laval

Crédit :Emilie Plantard

En soutenant leur action


C’est également la position de la CGT du CH de Laval. Le personnel des urgences est en grève illimitée depuis le 9 octobre mais, face au manque d’effectif, est assigné à travailler. Méryame El Hamdaoui est aide-soignante aux urgences de Laval et déléguée CGT, elle espère une mobilisation plus large de l’hôpital, voire de la population, pour faire faire pression sur la direction. Pour elle, l’idéal serait un mouvement collectif. 


"Ce serait d’y croire, de se battre mais tous ensemble en fait. C’est en faisant du bruit et en mobilisant la population qu’ils vont peut-être nous entendre. Parce que si on crie juste devant l’hôpital sans rien faire de plus… Voilà. C’est aussi en étant mobilisé, en se disant on est tous ensemble, on est dans le même bateau et on avance ensemble c’est l’unité qui fera la force. Et vous attendez que la population vous suive ? Oui, ce serait le plus important. Parce que ce sont eux les patients de demain. Et donc il faut qu’ils agissent avec nous. Vous aussi. On est tous susceptibles d’être un jour patient."

Titre :Méryame El Hamdaoui, déléguée CGT

Crédit :Emilie Plantard

Des conditions de travail infernales


La situation n’est plus tenable. Les patients, en attendant des heures aux urgences, sont maltraités. Mais le personnel l’est tout autant. D’où l’hémorragie de personnel au sein des services. Le Dr Caroline Brémaud, cheffe du service des urgences ne compte plus ses heures, au moins 70 par semaine. Elle témoigne de la fatigue, de la difficulté à accepter certaines choses malgré la solidarité au sein de son équipe :


"On n’arrive pas à poser tous nos congés, et moi je suis revenue sur mes vacances samedi par exemple. Mais depuis que je travaille, je n’ai jamais pris de congés complets. J’ai toujours été obligée de revenir soit une date au milieu de mes vacances, soit sacrifier le week-end de début soit le week-end de fin de mes vacances. Ça fait longtemps que j’ai renoncé à avoir une vie sociale programmée. Je ne fais que des activités de dernière minute. En fait, ce n’est pas tellement qu’on dépasse les horaires, ce n’est pas tellement le problème de rentrer chez soi à 22H ai lieu de finir à 20H30, c’est le problème d’être obligé de revenir sur une journée ou une nuit entière. Le faire de temps en temps parce qu’il y a un collègue en arrêt ou quelque chose, on se dit oui, c’est normal, mais c’est devenu la norme en fait. On est en train de tirer la santé vers le bas et personne ne dit rien en fait." 

Titre :Caroline Brémaud, cheffe du service des urgences

Crédit :Emilie Plantard

La CGT envisage une journée d’action le 4 décembre prochain. Le personnel gréviste attend la mobilisation de tout le personnel soignant et non soignant de l’hôpital, mais aussi de la population.