Gazole. L'inquiétude des marins-pêcheurs du Guilvinec

Publié : 20 septembre 2023 à 8h11 - Modifié : 20 septembre 2023 à 8h19 par Dolorès CHARLES

Crédit : Yann Launay

Le secrétaire d’Etat à la mer, le breton Hervé Berville a confirmé la fin des aides sur le gazole pour les pécheurs. Très en colère, ils comptent bien manifester lors des Assises de la pêche et des produits de la mer, organisées en fin de semaine à Nice. Reportage au Guilvinec (29).

L'inquiétude grandit, chez les marins-pêcheurs de l'Ouest, après l'annonce de la fin des aides sur le gazole. Les entreprises de pêche percevaient 20 centimes par litre, pour faire face à l'augmentation des prix du carburant. Une aide que l'Etat veut stopper au 15 octobre. Inacceptable, pour les professionnels. Pascal est marin pêcheur sur le "Bara an Arvoriz", un chalutier basé au Guilvinec, dans le Finistère, et qui actuellement fait la pêche au thon.



"Tout est toujours plus cher et le poisson est toujours moins cher."



Pascal, comme chaque membre d'équipage, participe aux frais de carburant, et pour lui si l'aide disparaît, autant rester à terre : "0,20 € de moins par litre, on est à 6 000 € de charges en plus, et 6 000 € pour un équipage de 6 cela fait 1 000 € mois sur la paie ! Au delà des 0,80 € du litre, on commence déjà à se poser des questions et sans l'aide à partir du 15 octobre, il va passer à un euro... On va travailler à perte. Tout est toujours plus cher, le poisson est moins cher tout le temps à l'étal et il est toujours plus cher dans les poissonneries. A qui profite le crime? Pas nous. Tous les frais, que ce soit l'alimentaire, l'électricité, la mécanique, le matériel, tout est toujours plus cher et le poisson est toujours moins cher. Automatiquement, si on rajoute le carburant, ce n'est plus possible."

Titre :Pascal, marin-pêcheur au Guilvinec (29)

Crédit :Yann Launay

La filière pêche doit s'organiser


Hervé Berville, le Secrétaire d'Etat à la Mer, explique que ces aides ne peuvent être prolongées, puisque le régime européen qui les autorisait va prendre fin, et que la filière pêche doit s'organiser. Le président du Comité national des pêches répond que c'est au gouvernement français d'obtenir les feux verts européens. Olivier Le Nézet rappelle que la Première ministre Elisabeth Borne a promis en avril dernier de ne pas lâcher la pêche française, quitte à solliciter les entreprises qui font des superprofits sur les carburants.


"La Première ministre doit tenir parole, donc à elle de négocier et de voir avec les entreprises énergétiques, entre autres, Total ou autre pour venir en soutien. On est sur une activité nourricière, on est sur une activité en difficulté depuis plusieurs années, due au Brexit, due au Covid ou au dérèglement climatique où les pêcheurs sont les premières victimes, rappelle Olivier Le Nézet. Il est vital de le faire rapidement et j'espère que le ministre viendra avec des annonces de ce type aux Assises de la pêche, car très clairement la production est touchée au cœur. La mise en marché et la filière aval, si rien n'est fait, vont mourir."

Crédit : Yann Launay

Titre : Olivier Le Nézet

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Il y a aujourd'hui un navire de pêche ne peut pas être à l'hydrogène, ce n'est pas autorisé par l'Union européenne.



Après tout, n'est-ce pas le bon moment pour les pêcheurs de changer leurs pratiques, leurs moteurs, pour sortir de la dépendance au gazole ? Pour Olivier Le Nézet, la volonté est là, mais c'est impossible dans l'immédiat : "sur la transition énergétique, il y a des choses qu'on peut faire évoluer, mais pas avec les navires existants. Il faut pouvoir renouveler cette flotte et avoir du soutien public pour la renouveler. L'Union européenne propose de la décarbonation mais ne se donne pas les moyens de sa politique. Il faudra déjà un outil financier digne de ce nom et en même temps que la réglementation soit en adéquation. Il y a aujourd'hui un navire de pêche ne peut pas être à l'hydrogène, ce n'est pas autorisé par l'Union européenne. Et quand on voit la lourdeur pour la validation de réglementations au niveau européen, il faut au moins cinq ans minimum, voire dix ans. Tout cela est un chantier énorme et la problématique est urgentissime. Il y a l'urgence, le court terme, le moyen long terme, mais on ne peut pas aller dire que d'un revers de main, tout va se faire du jour au lendemain."

Titre : Olivier Le Nézet

Crédit :Yann Launay

Alors que vont s'ouvrir les Assises de la pêche à Nice, les professionnels comptent sur le gouvernement pour annoncer une solution. Les Assises auront lieu ce jeudi (21 septembre) et vendredi (22 septembre).