Dans les marais de Guérande, un début de saison moins difficile qu'en 2022
Publié : 11 juillet 2023 à 14h33 - Modifié : 12 juillet 2023 à 12h17 par Emilie PLANTARD
Crédit : Emilie Plantard
L’été 2022 restera dans les annales des paludiers, tant par sa dureté que par les quantités de sel récoltées. Certains redoutaient de voir se profiler une nouvelle période de sécheresse en 2023, mais le début de cette saison les a rassurés.
Alors que la canicule fait souffrir le sud-est de la France - on attend près de 40° par endroits - l’ouest est pour l’instant épargné. Et cette météo, les paludiers la regardent de près... La récolte du sel est particulièrement dépendante du ciel, certains professionnels gardent d’ailleurs un souvenir amer de l’été 2022 et sa longue période de sécheresse. A Noirmoutier comme à Guérande, il avait fallu travailler très tôt dans la saison et surtout sans relâche, pour ramasser le précieux or blanc.
Cette année, la météo est un peu plus douce et ménage les paludiers. Dans les marais de Guérande, Fabien Ozanne est commercial pour la société de paludiers indépendants Tradysel. En 2022, ils avaient travaillé 52 jours sans s'arrêter et récolté en moyenne 4 tonnes de sel à l’œillet. 2023 s’annonce plus raisonnable... "On a commencé plus tard que l’année dernière mais malgré tout on a commencé début juin donc c’est satisfaisant. Par contre c’est vrai que le mois de juillet pourrait être moins productif que le mois de juin, si ça continue comme ça... Celui qui a souffert il a toujours un peu d’appréhension que ça recommence, mais là, au vu du climat qu’on a eu ces 2 derniers mois, on peut être un peu rassuré, on arrive à mi-juillet on a déjà eu une pause et puis la tendance est beaucoup plus fraîche que l’année dernière. Je pense qu’on aura une saison plus facile."
Titre :Fabien Ozanne, commercial pour Tradysel
Crédit :Emilie Plantard
« En 2022, on a produit beaucoup de fleur de sel »
Et encore plus précieux que le sel, la fleur de sel. Dans les marais de Guérande, elle représente un peu moins de 10% de la récolte. Flottant à la surface de l’eau dans les œillets, elle se récolte généralement le soir, quand chaleur et l’ensoleillement sont au rendez-vous. Emilie Plantard est allée en ramasser dans les marais de Guérande, avec Fabien Ozanne, il est commercial pour le groupement de paludiers Tradysel. "L’année dernière avec les vents d’est et le soleil exceptionnel, on a produit beaucoup de fleur de sel. Cette année, on a des ciels plus couverts, des petites pluies, on aura sûrement moins de fleur que l’année dernière. La fleur de sel c’est intéressant pour saler la table. C’est vraiment un sel de finition, c’est pour mettre sur l’assiette, sur le foie gras, les légumes, le poisson... Quelques grains suffisent, comme c’est un sel qui est humide et très finement cristallisé, il fond en bouche. Contrairement au sel de mine qui est dur avec des gros cristaux qui vont fondre dans l’estomac, la fleur de sel fond en bouche donc elle a un pouvoir salant et elle va moins saler l’organisme finalement."
Crédit : Emilie Plantard
Titre :Fabien Ozanne, commercial pour Tradysel
Crédit :Emilie Plantard
Un label Bio dans les tuyaux de l’Europe...
Dans les marais, les paludiers travaillent toujours à la main, en fonction de l’évaporation de l’eau de mer. Une méthode ancestrale bien différente du sel de mine, issu de gisements de l’est de l’Europe. Ce sont ces exploitants qui ont d’ailleurs demandé la possibilité d’une labellisation bio auprès de l’Europe. Les critères d’attribution sont toujours en débat mais ce projet fait peur aux paludiers, comme à Guérande où Fabien Ozanne représente le groupement Tradysel : "Nous on ne trouve pas que ce soit intéressant parce que notre méthode a déjà plus de 500 ans... Avant qu’il y ait une agriculture conventionnelle avec des produits de synthèse, il y avait déjà du sel de Guérande, et si l’agriculture s’est industrialisé, notre méthode est restée la même. Nous on travaille avec le vent, le soleil, l’eau de mer et la force physique. Alors la marque Nature et Progrès a un certain sens parce que derrière il y a de l’éthique, mais pour l’agriculture biologique, ça nous parait moins évident. On risque d’être obligé de monter dans le train parce que certains producteurs vont le revendiquer et c‘est vrai qu’on voit de plus en plus de certifications dans l’alimentation mais je ne pense pas que ça ait beaucoup de sens."
Au niveau européen, le sel de Guérande bénéficie déjà d’une IGP, une Indication Géographique Protégée, garantissant la technique de récolte et la qualité de la production.
En juin, la commission de l’Agriculture du Parlement européen a voté le rejet de l'acte délégué définissant les types de sel pouvant porter la mention « sel biologique ». Le groupe des Socialistes et Démocrates, porté par le député européen nantais Christophe Clergeau, a appelé à voter contre cette proposition de rejet.
Titre :Fabien Ozanne, commercial pour Tradysel
Crédit :Emilie Plantard